Le Conseil de sécurité des Nations Unies a de «bonnes raisons» de s'interroger sur la pertinence d'un large envoi de casques bleus dans la région soudanaise du Darfour, a déclaré le responsable des opérations de maintien de la paix à l'ONU dans une interview publiée jeudi.

Interrogé par le Financial Times, Jean-Marie Guehenno a affirmé que les Nations Unies avaient atteint les «limites» de leurs capacités, et souligné qu'un simple échec pourrait nuire à l'ensemble des opérations de maintien de la paix de l'ONU.

«En toute franchise, je dirais qu'il y a de bonnes raisons d'être hésitant», a déclaré M. Guehenno au quotidien économique britannique. «Il n'y a pas de processus politique suffisamment avancé aujourd'hui pour assurer la réussite d'une mission de maintien de la paix (au Darfour)», a-t-il ajouté.

Tout en reconnaissant «l'énorme détresse des habitants du Darfour», M. Guehenno estime que les Nations Unies «ont atteint les limites» de leurs capacités.

«Le risque, c'est d'engager une opération qui, si elle échoue, compromettrait un instrument qui aurait pu être très utile ailleurs», confie le patron des casques bleus.

«Ce faisant, non seulement nous n'aiderions pas ceux que nous souhaitions aider, mais en plus, nous porterions préjudice à tous ceux qui se trouvent dans des régions où des missions de maintien de la paix pourraient faire la différence», précise-t-il.

«Le Conseil de sécurité fait face à des décisions difficiles et il n'est pas facile de dire 'non'. Mais il ne devrait jamais dire 'oui' pour de mauvaises raisons», ajoute-t-il.

La force conjointe ONU-Union africaine au Darfour (Minuad), créée par le Conseil de sécurité en juillet 2007 pour protéger la population du Darfour, a pris le relais le 31 décembre 2007 de la mission africaine (Amis) qui, faute de moyens et de financement, a été incapable de s'imposer sur le terrain.

La Minuad, qui doit à terme devenir la plus importante force de paix dans le monde avec 26 000 hommes, soit 19 500 soldats et 6500 policiers, ne compte actuellement qu'environ un tiers des personnels autorisés et est sous-équipée.

Selon les Nations Unies, près de 300 000 personnes ont trouvé la mort et 2,2 millions ont du fuir leur maison depuis le début du conflit au Darfour en février 2002. Les autorités soudanaises, de leur côté, font état de 10 000 morts.