Une entreprise manufacturière a avoué hier avoir utilisé illégalement des BPC pendant des années avant de les déverser dans l'environnement autour de son usine de Baie-D'Urfé, malgré le grave danger que représentait la substance pour l'environnement.

Le Groupe sécurité C.M., entreprise spécialisée dans la fabrication de fenêtres incassables utilisées pour l'aménagement de prisons un peu partout en Amérique du Nord, avait été épinglé à la suite d'une enquête d'Environnement Canada.

À son usine de l'avenue Cruickshank, dans un parc industriel de l'ouest de l'île de Montréal, elle avait continué à utiliser des transformateurs aux BPC après leur interdiction il y a une dizaine d'années. Et ce, même si elle était informée des risques associés à ces substances hautement toxiques.

Puis, en janvier 2015, elle avait rejeté dans l'environnement un liquide qui s'était écoulé d'au moins un des appareils et qui contenait des BPC dans une proportion jugée inquiétante pour l'environnement.

Pour Daniel Green, président de la Société pour vaincre la pollution, le tort causé à l'environnement de l'ouest de l'île par de telles actions est « inimaginable ».

« Les BPC sont pour toujours. Chaque gramme émis dans l'environnement y reste », a-t-il souligné en entrevue avec La Presse.

« Les BPC se détruisent excessivement lentement et quand ils se dégradent, ils se dégradent parfois en substances encore plus dangereuses. »

Entente avec la couronne

L'entreprise a plaidé coupable dans le cadre d'une entente avec la Couronne, qui a accepté de retirer les accusations portées initialement contre Simone Draca et Ernesto Fera, deux de ses dirigeants.

La juge Suzanne Costom a suivi la recommandation commune des deux parties et imposé une amende de 240 000 $ à l'entreprise. Elle a noté comme facteur aggravant « la nature de la substance qui est très dangereuse pour l'environnement ». Mais elle a aussi tenu compte des remords exprimés par l'entreprise.

« La Couronne est satisfaite de l'issue du dossier. L'amende a un effet dissuasif, mais elle contribue aussi aux objectifs de développement durable de la loi, puisque le montant va au Fonds pour dommages à l'environnement », a déclaré la procureure de la Couronne fédérale, Me Trang Dai Nguyen, à sa sortie de la salle d'audience.

Daniel Green espère que l'affaire n'en restera pas là et qu'un suivi des dommages sera assuré. « Les traces doivent être encore là. Ça va se retrouver dans la chaîne alimentaire ultimement », dit-il.

Jointe au téléphone, Simone Draca, l'une des dirigeantes du Groupe sécurité C.M., a refusé de commenter les circonstances du déversement. « C'est ma fête aujourd'hui, Monsieur, je n'ai rien à dire », a-t-elle laissé tomber avant de mettre fin à la conversation.

Nombreuses tuiles

Il s'agit d'une tuile additionnelle pour l'entreprise Groupe sécurité C.M., qui a connu une année difficile.

L'entreprise a déclaré faillite cet hiver et une partie de ses biens ont été mis en vente à l'encan depuis.

Les dirigeants du Groupe sécurité C.M. ont par ailleurs été fortement secoués en juin dernier lorsqu'une bombe a explosé dans la boîte aux lettres du fondateur et actionnaire de l'entreprise, Cedomir Draca, le père de Simone Draca.

L'engin explosif avait mal fonctionné et il avait causé des blessures mineures à une femme qui avait ouvert la boîte aux lettres, devant la luxueuse résidence de Senneville. Mais les conséquences auraient pu être beaucoup plus graves pour la victime, avait alors confié un enquêteur spécialisé à La Presse.

« La bombe était très dangereuse. Si tout s'était déroulé comme on pourrait le craindre, l'engin était assez puissant pour la tuer », avait dit le lieutenant-détective Christian St-Pierre, de la Section des incendies criminels du Service de police de la Ville de Montréal.

La police n'a toujours pas identifié de suspect relativement à cet attentat à la bombe.