L'exploitation du gaz de schiste pose des «risques élevés» pour le sol, l'air, l'eau de surface et l'eau souterraine, selon un nouveau rapport rédigé à la demande de l'Union européenne et rendu public au début du mois.

Cette étude paraît alors que quelques pays européens, dont la Pologne et l'Angleterre, envisagent d'exploiter cette ressource afin de remplacer les champs gaziers traditionnels locaux qui s'épuisent ou de s'affranchir des importations.

D'autres nations, comme la France et la Bulgarie, estiment de leur côté que la technique de fracturation hydraulique nécessaire pour extraire le gaz de schiste est trop risquée pour le moment.

Le nouveau rapport, rédigé par un consortium de cinq firmes de consultants, penche du côté des pays plus prudents. En particulier dans le contexte européen, où la population est très dense. En effet, l'intensité des champs gaziers risque de causer des dommages irréversibles à l'agriculture et de nuire de façon permanente aux autres usages du sol et du milieu, comme le tourisme et la villégiature.

«Il faudra environ 50 puits de gaz de schiste pour remplacer un seul puits gazier de la mer du Nord», note le rapport.

Les auteurs calculent que l'industrie gazière occuperait à elle seule 1,4% du territoire au-dessus d'un gisement, alors que d'autres usages comme l'habitation, l'industrie et le transport n'occupent ensemble que 4% du territoire européen. C'est l'unique élément recevant la cote de risque «très élevé» dans le rapport.

Par ailleurs, les auteurs estiment que le risque de contamination des eaux souterraines est «élevé», compte tenu des accidents et des défauts qui peuvent altérer le coffrage des puits de gaz de schiste. Risques qui sont multipliés du fait que les puits eux-mêmes sont très nombreux. En outre, ils n'écartent pas la possibilité que des fractures naturelles dans le sous-sol produisent des contacts entre les zones fracturées par l'industrie et les nappes d'eau potable.

La pollution de l'air due à la machinerie lourde nécessaire à l'exploitation du gaz de schiste est également ciblée comme un risque «élevé».

L'ensemble des activités de l'industrie comporte aussi un risque «élevé» pour la biodiversité, en raison de la pollution et de la fragmentation des habitats.

Le rapport décèle plusieurs lacunes dans la réglementation actuelle en Europe. Il recommande de s'inspirer des mesures mises en place aux États-Unis et au Canada afin de mitiger certains de ces risques.

Deux fois mieux que le charbon

Dans le deuxième tome de ce même rapport, toutefois, le gaz de schiste reçoit une bonne note pour son impact sur le climat mondial.

Les auteurs rejettent notamment les conclusions du professeur Robert Howarth, de l'Université Cornell, fréquemment citées par les opposants au gaz de schiste, selon lesquelles cette ressource est pire que le charbon en matière de gaz à effet de serre (GES).

D'après l'étude européenne, le gaz de schiste causerait l'émission d'un peu plus de 400 grammes de GES par kilowattheure d'électricité. C'est deux fois moins que le charbon. Et il s'agit d'un niveau comparable au gaz importé de Russie ou aux importations de gaz naturel liquéfié.

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Journée mondiale anti-fracturation

Des militants anti-gaz de schiste de partout dans le monde ont décrété qu'aujourd'hui sera la première Journée mondiale contre la fracturation hydraulique, cette technique nécessaire à l'extraction du gaz de schiste. Au Québec, les comités de citoyens de la vallée du Saint-Laurent se sont donné rendez-vous à Drummondville. L'élection du Parti québécois et les déclarations de la nouvelle ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, plantent un tout nouveau décor pour ce mouvement de contestation. «Un peu comme en Europe, l'arrivée des verts au pouvoir a vraiment changé les choses, dit Kim Cornelissen, de l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA), qui participe à la réunion d'aujourd'hui. Mais c'est un gouvernement minoritaire, et on veut le soutenir pour qu'il passe aux actes. Ce serait génial que le Québec fasse comme la France. Et si on est ferme sur cette question, ça aura plus d'impact à l'international. Il y a un effort de solidarité à faire. Il y a 42 pays qui ont du gaz de schiste et c'est la même guerre d'information partout.»