Accusée d'avoir sciemment caché l'ampleur d'une marée noire, ce qu'elle récuse, la société américaine ConocoPhillips a dû cesser d'exploiter un champ pétrolifère situé dans le plus grand gisement offshore de Chine, sur ordre de Pékin.

Le gisement Penglai 19-3 représente la plus importante découverte au large des côtes chinoises pour ConocoPhillips et l'une des principales réserves exploitables d'or noir en Chine. Sa mise à l'arrêt intervient après des critiques croissantes en Chine visant le géant américain.

«La production de pétrole a été interrompue dimanche soir au gisement Penglai 19-3, qui est le plus important site d'extraction de pétrole offshore de ConocoPhillips en Chine», a déclaré lundi à l'AFP Mme Donna Xue, l'un des porte-parole de la société.

«Les opérations d'arrêt de la production ont été achevées à 20H00 hier», a ajouté le porte-parole du groupe américain, sommé de s'exécuter face aux autorités chinoises, insatisfaites du colmatage des fuites de brut dans le golfe du Bohai (nord-est).

La société américaine a été accusée lundi par le Quotidien du Peuple, organe officiel du Parti communiste au pouvoir en Chine, d'«indifférence» face aux dégâts causés à l'environnement. La presse chinoise a accordé une large place aux pêcheurs et aux employés de fermes aquacoles se plaignant de pertes dans leur chiffre d'affaires.

«Il existe un contraste flagrant entre la sensibilité de l'entreprise concernant son image et l'indifférence dont elle fait preuve quant à la pollution de l'écosystème marin», a écrit dans une tribune l'éditorialiste Jiang Hongbing.

Le journal a stigmatisé les «retards répétés» et la «série de dissimulations et de tromperies» dont selon lui s'est rendu coupable ConocoPhillips depuis que du brut ainsi que des boues de forage à base d'huile ont commencé à s'échapper dans la mer.

Au total une quantité de 3200 barils de matières polluantes s'est échappée de deux plateformes que la société américaine opère en mer avec la société étatique chinoise CNOOC.

Le quotidien China Daily a de son coté assuré dans un éditorial lundi que ConocoPhillips China s'était rendu coupable de «violations graves» des règles de conduite en cas de marée noire.

ConocoPhillips a pourtant nié toute dissimulation et endossé sa responsabilité.

«Nous sommes l'opérateur et nous acceptons de prendre l'entière responsabilité pour ce qui s'est produit sur le champ», a déclaré au téléphone à l'AFP John Roper, autre porte-parole de ConocoPhillips.

«Nous avons immédiatement rapporté l'accident aux autorités compétentes, et de façon aussi complète que possible», a-t-il ajouté.

ConocoPhillips avait affirmé mercredi avoir pratiquement terminé de réparer les dégâts causés par la fuite de pétrole qui avait pollué des milliers de km2 dans le golfe du Bohai.

Mais l'Administration d'État chinoise chargée de la gestion des océans (SOA) a tenu à vérifier elle-même jeudi les résultats des opérations de nettoyage, en employant des satellites, des avions et des robots sous-marins. Et au final elle a estimé que la situation n'était pas résolue.

Elle a reproché à ConocoPhillips d'avoir échoué «à faire le tour de toutes les sources potentielles de fuites et (d'avoir échoué) à colmater les fuites une bonne fois pour toutes», selon l'agence Chine nouvelle.

Le champ offshore de Penglai 19-3, dont l'exploitation a débuté en 1999, devait produire 60 000 barils par jour en 2011, selon ConocoPhillips. Lundi en milieu de séance, l'action CNOOC avait chuté de 7,6% à la Bourse de Hong Kong.

Si les opérations à Penglai 19-3 restent gelées, la production nette de la CNOOC va enregistrer une baisse de 8 millions de barils cette année, soit un recul de 2,3% par rapport à ses prévisions, a estimé Crédit Suisse, cité par l'agence Dow Jones.