Même si le processus officiel d'évaluation du projet Énergie Est est actuellement sur la glace, de nouveaux membres temporaires de l'Office national de l'énergie (ONÉ) pourraient commencer à mener des consultations parallèles très prochainement.

Ottawa a nommé jeudi quatre membres temporaires à l'ONÉ pour consulter les gens du public, dont les communautés autochtones, qui seraient touchés par la construction du pipeline Énergie Est.

Mais les nouveaux commissaires chargés de remplacer les trois personnes qui siégeaient sur le panel d'évaluation du projet de pipeline et qui ont démissionné dans la controverse n'ont pas encore été désignés.

Le ministre des Ressources naturelles, Jim Carr, a annoncé que Damien Côté, du Québec, Ronald Durelle, du Nouveau-Brunswick, Wilma Jacknife, de l'Alberta, et Alain Jolicoeur, de l'Ontario, auront comme tâche de consulter la population tout au long du tracé de l'oléoduc de TransCanada.

Le gouvernement avait promis d'ajouter des effectifs à l'ONÉ pour lui permettre de mener à bien ses évaluations. En point de presse, le ministre a indiqué que ce sera à l'organisme fédéral de décider quand ces quatre nouveaux membres entameront leur travail.

«Ce sera à l'ONÉ de déterminer, parce qu'il s'agit d'un organisme indépendant et quasi-judiciaire, où les membres seront placés et quand les audiences reprendront», a expliqué M. Carr en mêlée de presse.

«C'est leur décision, a-t-il poursuivi. Ce que nous leur offrons aujourd'hui, ce sont de nouveaux membres pour leur permettre de faire un travail correct.»

Joint au téléphone, son attaché de presse Alexandre Deslongchamps a toutefois signalé «qu'il n'y avait pas de raison d'avoir un délai», puisque les deux processus sont parallèles. Il a néanmoins lui aussi réitéré que la décision revenait à l'ONÉ.

Le porte-parole de l'office, Marc Drolet, n'était pas en mesure, jeudi, de spécifier quand les quatre nouveaux membres se mettront au boulot.

Aux yeux de Patrick Bonin, de Greenpeace, il serait inacceptable que les travaux reprennent si vite, alors que la crédibilité du processus est entachée.

«L'évaluation est partie tout croche, a-t-il lancé en entrevue. On l'a vu avec l'affaire Charest. Ce n'était que la pointe de l'iceberg. Et là, ce n'est pas en rajoutant des couches sur un processus qui est en train de déraper qu'on va régler le problème.»

Selon lui, il y aura de nouvelles contestations et d'autres dérapages si Ottawa précipite les choses.

Les trois commissaires Roland George, Jacques Gauthier et Lyne Mercier, de l'ONÉ, chargés d'étudier le projet Énergie Est, avaient dû se récuser en septembre en raison d'allégations de conflit d'intérêts. Le «National Observer» avait révélé que les commissaires Gauthier et Mercier avaient rencontré secrètement l'ex-premier ministre Jean Charest, alors que celui-ci était consultant pour TransCanada.

La grogne soulevée par ces informations avait poussé les commissaires à tirer leur révérence. Depuis leur démission, toutes les audiences sur le projet ont été suspendues.

Nouveaux commissaires

M. Carr a d'ailleurs confirmé que les trois nouveaux commissaires chargés de l'évaluation d'Énergie Est, parfaitement bilingues, devraient être nommés dans les prochaines semaines.

On ignore encore si l'ONÉ reprendra le processus d'évaluation du début. Si l'office décidait de le faire, l'échéancier du projet pourrait être repoussé.

Le comité de l'ONÉ devait au départ fournir son rapport de recommandations en mars 2018. Le gouvernement de Justin Trudeau s'accordait six mois supplémentaires, ce qui permettait une décision au plus tard en septembre 2018.

Pour le député conservateur Gérard Deltell, M. Carr doit nommer les nouveaux commissaires au plus vite, pour remettre la machine en marche.

«Il est temps que le gouvernement nomme les personnes pour les remplacer, parce que pendant ce temps-là, (...) il n'y a strictement aucune démarche qui est faite pour avancer ce projet structurant et essentiel pour l'économie canadienne qu'est l'oléoduc d'Énergie Est», a-t-il dit.

Si le pipeline de 4600 kilomètres est autorisé, il transportera quotidiennement 1,1 million de barils de pétrole destiné à l'exportation de l'Alberta jusqu'au Nouveau-Brunswick.