Les ménages à faible revenu risquent d'être touchés «de façon disproportionnée» par l'augmentation des prix de l'essence qui découlera de l'adhésion du Québec au marché du carbone, prévient un rapport qui sera rendu public aujourd'hui. Un document dans lequel la Commission de l'écofiscalité du Canada recommande entre autres d'utiliser la cagnotte accumulée dans le Fonds vert pour réduire l'impôt des Québécois.

Essence

La tarification du carbone est le meilleur moyen de lutter contre les changements climatiques, selon la Commission, qui rassemble plusieurs économistes indépendants. Toutefois, si tous les produits dérivés du charbon, du pétrole et du gaz coûtent plus cher, les ménages moins nantis pourraient être pénalisés. Au Québec, contrairement aux autres provinces, les tarifs d'électricité resteront inchangés. Mais l'imposition d'un prix du carbone fera augmenter le prix de l'essence. « Cette hausse toucherait de façon disproportionnée les ménages à faible revenu », prévient la Commission. Elle suggère d'atténuer le choc en transférant à ces ménages une partie des recettes de la tarification.

Impôt

Le fardeau fiscal des Québécois est l'un des plus élevés au pays, note la Commission. Le gouvernement pourrait donc « créer d'importants avantages économiques » en affectant une partie des recettes du marché du carbone à la réduction de l'impôt. La chercheuse France St-Hilaire, commissaire à la Commission, cite en exemple la Colombie-Britannique. Cette province a imposé une taxe sur le carbone à « effet neutre » pour les finances de l'État. « On a dit qu'on augmente les tarifs des ménages et des entreprises par la tarification du carbone, a-t-elle indiqué. Mais l'effet net pour le gouvernement était neutre parce qu'on a diminué l'impôt des particuliers et des sociétés par le même montant. »

Infrastructures

Cela peut sembler contradictoire, puisque les transports sont la principale source d'émissions de gaz à effet de serre (GES) du Québec, mais un investissement dans les routes, les ponts et les égouts serait « hautement prioritaire », selon le rapport. Les infrastructures de la province sont les plus vieilles au Canada. La Commission recommande à Québec d'affecter une partie des recettes de la tarification du carbone à leur remise en état. « Il a été démontré que les dépenses en infrastructures permettent d'augmenter la productivité et la croissance économique », note Mme St-Hilaire.

Dette

La Commission fait aussi valoir que la dette du Québec en proportion de son PIB est la plus élevée au Canada. Afin d'éviter que le service de la dette plombe encore davantage les finances publiques, « il pourrait donc être avisé d'affecter les recettes de la tarification du carbone à la réduction de la dette provinciale », indique le rapport. Cette option permettrait à la fois d'assainir les finances publiques et de favoriser « l'équité intergénérationnelle », selon la Commission.

Technologie

Le Fonds vert, constitué à partir de la vente des crédits de carbone, a reçu 830 millions en 2015 pour financer des projets technologiques et d'efficacité énergétique. La gestion de cette cagnotte a été fortement critiquée, notamment par le vérificateur général. Puisque la province est déjà un « chef de file » dans les investissements en technologies propres, la Commission juge « moins prioritaire » l'injection de nouvelles sommes dans ce secteur. Québec pourrait néanmoins y être forcé, convient-elle, car ses cibles de réduction des gaz à effet de serre forceront la province à « miser pleinement sur les technologies propres ».