Un vent de révolution verte est en train de balayer Mexico, mégapole ultra-polluée. Ses toits et balcons verdissent peu à peu alors que les transports «verts» gagnent du terrain dans les rues face aux quatre millions de véhicules s'engouffrant chaque jour dans la mégapole.

«C'est notre vote en faveur de l'environnement!», clame derrière ses lunettes Elias Cattan, un architecte de 33 ans, en désignant ses laitues, oignons et piments qui poussent sur le balcon de son bureau au dernier étage d'un immeuble du quartier à la mode de Condesa.

«C'est une fenêtre sur le futur, il est très important de renouer le lien avec la terre,» poursuit-il alors qu'une pluie fine vient rafraîchir ses pousses.

À l'image d'un nombre croissant de «chilangos», comme on appelle les résidents de Mexico, Elias se rend à son travail en bicyclette, au milieu des sempiternels embouteillages qui engorgent les grandes artères.

Il y a 20 ans, les Nations unies ont classé Mexico, située à environ 2240 mètres d'altitude, en tête des villes les plus polluées de la planète. À l'époque, l'air était si vicié qu'il n'était pas rare de voir des oiseaux tomber raide-morts.

Aujourd'hui, la capitale mexicaine continue à afficher des taux de pollution préoccupants, mais elle figure désormais au-delà de la 10e place. Cette performance est due à la fermeture d'usines polluantes et à une forte limitation des émissions de CO2, mais également à la situation désastreuse d'autres villes.

Le gouvernement de gauche du district fédéral a lancé en 2007 un «plan vert» pour tenter de nettoyer Mexico.

La ville a planté 500 000 végétaux à travers l'agglomération, étendu les populaires locations de bicyclettes, ouvert une nouvelle ligne de métro et lancé des «éco» bus roulant au gaz naturel ainsi que des taxis électriques dans le centre-ville.

Les restrictions de circulation pour les vieux véhicules ont aussi été durcies depuis peu.

Au parc Chapultepec, chaque premier dimanche du mois, on peut échanger ses bouteilles vides, vieux papiers et cartons contre des légumes dans le cadre d'une opération mise en place par la municipalité.

Mais les «chilangos» n'ont pas attendu la mairie pour apporter leur écot au niveau privé. Une association appelée VerdMX a fixé des jardins verticaux géants à plusieurs points de la ville, notamment une «arche verte» sur la très fréquentée avenue Chapultepec.

Aujourd'hui, les apprentis jardiniers se multiplient et la municipalité, ainsi que plusieurs associations, proposent des cours de plantation en immeuble.

«C'est facile, divertissant, et économique», affirme Liliana Balcazar, directrice adjointe des centres d'éducation environnementale de la ville. «On peut le faire partout où l'on peut avoir de cinq à six heures de soleil quotidiennes», assure Mme Balcazar.

«C'est comme être un peu à la campagne à l'intérieur de la ville», note encore Mme Balcazar, vantant les bienfaits de ces cultures, pour l'environnement, mais aussi en faveur d'une alimentation plus saine dans ce pays enregistrant des taux d'obésité records.

Gabriela Vargas, une ancienne photographe de 43 ans, a fait de cette passion née il y a 12 ans un véritable métier.

À l'époque «j'étais cette folle qui faisait pousser de la laitue dans son appartement. C'est devenu très courant depuis», affirme celle qui est devenue directrice de projet de Culture Ville (Cultiva Ciudad). Cette organisation prodigue ses conseils de jardinage aux écoles, institutions et particuliers.

Désormais, Gabriela voit plus grand: elle plante des arbres. L'année dernière, Cultiva Ciudad a fait don de quelque 6000 jeunes arbres à plusieurs quartiers.

En outre, elle a entrepris d'installer un verger de 1650 m2 sur un terrain en friche prêté par la ville. Elle envisage d'y planter des pommiers, des goyaviers, des pêchers et des néfliers.

Aujourd'hui, si Mexico verdit peu à peu, une chape grisâtre continue de surplomber son agglomération vallonnée.

Les émissions de monoxyde de carbones ont été réduites de 90% depuis 20 ans, mais les taux d'ozone et de particules fines dans l'air restent au-delà des niveaux recommandés .

Pour l'ozone, «la bonne nouvelle est que la tendance a enregistré une baisse constante ces 10 dernières années», constate Armando Retama, directeur du service de contrôle de la qualité de l'air de la ville.

«Si cette tendance se poursuit, le problème de pollution de Mexico sera quasiment résolu dans 10 ans», assure-t-il.