Le gouvernement Harper a décerné jeudi le statut d'«espèce préoccupante» à l'ours polaire. La décision suscite des réactions partagées chez les environnementalistes et les scientifiques, qui soulignent que les changements climatiques sont la principale menace qui pèse sur ces mammifères.

Le gouvernement se donne trois ans pour accoucher d'un plan de gestion, dont l'objectif sera d'atténuer l'impact des activités humaines sur l'espèce. Il lancera bientôt une consultation auprès des provinces et des communautés autochtones pour discuter des meilleures mesures à adopter. D'ici là, les règles qui encadrent la chasse restent les mêmes.

«Le Canada abrite les deux tiers de la population mondiale d'ours blancs, et nous avons l'unique responsabilité au chapitre de la conservation de les protéger efficacement», a affirmé le ministre de l'Environnement, Peter Kent, dans un communiqué.

Certains environnementalistes ont accueilli la nouvelle avec étonnement. Mardi, le ministre Kent a confirmé que le Canada n'adhérera pas à une deuxième phase du protocole de Kyoto, et annoncé des investissements de 150 millions pour favoriser l'adaptation aux changements climatiques.

«C'est à n'y rien comprendre», a affirmé Steven Guilbault, d'Équiterre. Selon lui, l'annonce contredit les prises de position du gouvernement Harper en matière de changement climatique depuis son élection, en 2006.

Le World Wildlife Fund (WWF) et Nature Canada ont pour leur part salué la décision du gouvernement Harper. Ils ont bon espoir que la décision l'incitera à lutter plus fermement contre les émissions de gaz à effet de serre.

«Dans ce cas-ci, les changements climatiques sont la principale menace, a affirmé Jean Langlois, porte-parole de Nature Canada. On revendique de l'action pour contrer cette menace.»

Or, dans le décret qui confirme le nouveau statut de l'ours, le gouvernement laisse entendre que c'est la chasse, et non les changements climatiques, qui constitue la plus grande menace pour l'animal. Le document précise que 4 des 13 sous-populations d'ours polaires du Canada devraient voir leur taille diminuer d'ici une quarantaine d'années.

«Les déclins sont partiellement attribuables aux changements climatiques dans l'ouest de la baie d'Hudson et le sud de la mer de Beaufort, peut-on y lire, mais principalement causés par l'exploitation non durable dans le bassin Kane et la baie de Baffin.»

Cette analyse sous-estime «grossièrement» le risque que posent les changements climatiques, affirme Andrew Derocher, professeur de biologie à l'Université de l'Alberta. Il souligne qu'une recherche menée par le gouvernement américain a conclu que les deux tiers des ours polaires pourraient disparaître d'ici une quarantaine d'années en raison de la fonte des banquises.

«La seule préoccupation sérieuse en ce qui concerne la conservation de l'ours polaire est le changement climatique et la fonte des banquises», a-t-il tranché, joint sur les rives de la baie d'Hudson, où il étudie les ours.