La réserve forestière de Juma, au coeur de l'Amazonie brésilienne, est un exemple des maux qui pèsent sur la plus grande forêt tropicale du monde - présence clandestine de bûcherons et grande pauvreté des habitants-, mais cette situation est en passe de changer grâce à un projet carbone pionnier.

Accompagnée de ses six enfants et une lettre en poche au nom des douze familles de sa petite communauté, Maria Edines Gonçalves a marché six heures dans la jungle pour atteindre la communauté voisine où a été lancé un projet du gouvernement local d'Amazonas, en collaboration avec la chaîne internationale d'hôtels Marriott.

La lettre de Maria Edines demande trois choses aux autorités locales: une école, des équipements pour moudre la farine de manioc et un générateur pour avoir de l'électricité.

«C'est la première fois que quelqu'un du gouvernement arrive jusqu'ici», a-t-elle expliqué.

Le projet lancé vendredi vise à améliorer les conditions de vie des 322 familles de Juma, une réserve forestière située à 300 Km au sud de Manaus à vol d'oiseau et accessible seulement par bateau. Elle a été créée en 2006 par le gouvernement d'Amazonas pour tenter de freiner les déboisements, la construction d'une petite route ayant facilité l'entrée d'exploitants forestiers et de chercheurs d'or clandestins.

«Il y a quatre ans fonctionnaient ici six scieries illégales. Les propriétaires sont arrivés avec beaucoup d'argent et menaçaient les habitants d'expulsion», explique le Père Ramiro, un prêtre espagnol qui vit depuis 25 ans dans la région et a reçu des menaces de mort.

La création de la réserve d'un demi-million d'hectares a déjà réussi à freiner quelque peu la destruction, selon lui.

Juma est le premier projet carbone au Brésil ayant été certifié par l'Alliance Climat, communauté et Biodiversité (CCBA) développé pour lutter notamment contre le réchauffement climatique.

«Nous sommes en train de créer un instrument économique pour assurer la préservation de la forêt tout en reconnaisant les services écologiques rendus par les populations qui y vivent», a déclaré Virgilio Viana, directeur de la Fondation Amazonas Durable qui gère les réserves de cet État avec des financements publics et privés.

Le groupe Marriott, qui compte près de 3000 hôtels dans 69 pays, proposera à chacun de ses clients de faire don d'un dollar pour préserver Juma, où les habitants vivent de la cueillette de fruits et de la production de farine de manioc. Cette contribution servira à annuler les émissions de gaz à effet de serre qu'ils produisent en une nuit, soit 32 kilos de C02.

Le projet prévoit que, d'ici à 2016, 3,6 millions de tonnes de dioxyde de carbone (CO2) auront été compensées à Juma.

En retour, Marriott et d'autres entreprises que le gouvernement d'Amazonas a l'intention de convaincre pour protéger la région, gagneront une image de compagnies «écologiquement correctes» qui s'efforcent d'éliminer les émisisons de CO2 qu'elle produisent.

Le Brésil est le quatrième principal émetteur de gaz à effet de serre de la planète et à la différence des pays industrialisés, 75% de ses émissions de CO2 ne proviennent pas de l'indsutrie mais de la déforestation par brûlis.

L'État d'Amazonas est le mieux préservé du pays car il conserve 98% de sa couverture végétale originale mais au rythme actuel de déforestation, on calcule qu'il aura perdu 30% de ses forêts d'ici à 2050, d'après Virgilio Viana.