L'impact environnemental des sables bitumineux s'est une fois de plus retrouvé au coeur des débats au Canada, hier, au moment où la communauté internationale se réunit à Varsovie pour une conférence sur les changements climatiques. Le Québec et l'Ontario ont annoncé des consultations sur deux projets de pipeline, pendant qu'Ottawa lance une nouvelle offensive contre une directive européenne qui étiquetterait le pétrole canadien comme plus polluant.

Le gouvernement Harper a lancé une nouvelle salve contre une politique envisagée par l'Union européenne qui découragerait l'utilisation du pétrole des sables bitumineux.

Ottawa a publié hier une étude de la firme ICF qui met en cause la méthodologie des décideurs européens dans l'élaboration de la « Directive sur la qualité des carburants ». Cette politique classerait le pétrole bitumineux dans une catégorie plus polluante que le pétrole classique.

L'étude publiée par le fédéral conclut que l'UE s'est basée sur des études incomplètes. On aurait notamment sous-estimé les émissions de gaz à effet de serre dans la production de pétrole lourd dans d'autres pays.

« Les mesures de mise en oeuvre qui accompagnent la Directive, dans leur forme actuelle, ne présentent pas un caractère scientifique, elles sont discriminatoires, elles auraient pour effet de décourager la divulgation des données, elles nuiraient à l'industrie du raffinage en Europe et ne permettraient pas d'atteindre l'objectif environnemental fixé », a déclaré le ministre des Ressources naturelles, Joe Oliver.

Le Nouveau Parti démocratique a critiqué cette nouvelle offensive du gouvernement Harper, affirmant qu'elle ne découragera en rien les décideurs européens.

« Nos voisins nous critiquent à cause de l'inaction du gouvernement conservateur face aux changements climatiques, a dit le député Peter Julian. Au lieu des les écouter, les conservateurs essaient de faire de la publicité et de critiquer nos alliés. »

« Péjugé favorable » pour l'oléoduc d'Enbridge

Québec lance par ailleurs une commission parlementaire sur l'inversion du flux de l'oléoduc 9B d'Enbridge. Un projet « d'abord économique » pour lequel le gouvernement péquiste a « un préjugé favorable », indique son ministre de l'Environnement, Yves-François Blanchet.

« Mais pour que ce préjugé favorable se transpose en appui concret, il faut qu'on puisse garantir les retombées économiques pour le Québec et la sécurité en matière environnementale », précise-t-il.

Le projet permettrait d'acheminer du pétrole de l'Ouest aux raffineries de Montréal. Il s'agit d'une compétence fédérale, rappelle M. Blanchet. Québec ne peut pas bloquer le projet, mais peut utiliser son « poids politique ».

Les questions environnementales examinées porteront surtout sur les risques de fuites ou de déversement. M. Blanchet indique que l'évaluation des risques de l'oléoduc doit être comparée avec celle de l'autre principal mode de transport, le train.

Le ministère de l'Environnement fera une contre-expertise du rapport sur l'équipement et les risques que fournira Enbridge. La commission siègera jusqu'au 6 décembre. La décision de l'Office national de l'énergie devrait quant à elle être rendue l'hiver prochain.

Greenpeace se dit « mitigée » relativement à cette annonce. Son porte-parole pour la campagne climat, Patrick Bonin, salue la contre-expertise des données d'Enbridge. Mais il croit que l'exercice est annoncé trop tard, et ne laisse pas le temps aux groupes de se préparer.