Le ministre des Ressources naturelles Joe Oliver s'est lancé dans une tournée européenne pour faire la promotion des sables bitumineux albertains et s'en prendre à une directive qu'il juge discriminatoire envers le Canada.

L'Union européenne pourrait adopter cet automne une directive qui classerait les différents types de carburants selon leurs émissions de gaz à effets de serre, et ce, pour l'ensemble de leur cycle de vie. Les sables bitumineux, plus énergivores dans leur extraction que d'autres sources de pétrole, se verraient ainsi pénalisés.

Pour M. Oliver, un telle initiative vise directement le Canada. «On ne veut pas un résultat qui cible le Canada pour un traitement néfaste et qui n'est pas justifié considérant les faits scientifiques», a-t-il insisté en conférence téléphonique de Paris.

Il a pointé du doigt d'autres producteurs de pétrole qu'il juge tantôt moins transparents que le Canada, tantôt tout aussi polluants, voire plus.

«Les bruts de Californie et du Venezuela possèdent des niveaux d'émission égaux ou supérieurs à celui du Canada, mais la directive considère que les émissions canadiennes sont 22 pour cent plus élevées», a-t-il noté, ajoutant que cette valeur n'avait aucune base scientifique.

«C'est pour ça et pour d'autres raisons qu'on veut que la directive soit corrigée.» Après Paris, le ministre se rendra à Bruxelles et à Londres afin de signaler à nouveau les nombreux «défauts» de la directive proposée.

Même si le Canada n'exporte pas son pétrole en Europe pour l'instant, Ottawa veut avant tout empêcher qu'il ait mauvaise presse. Il souhaite également éviter de se fermer à d'éventuels nouveaux marchés.

Le sujet divise grandement les pays membres et le ministre Oliver n'a d'ailleurs pas voulu préjuger de l'issue du vote final. L'an dernier, l'Union européenne avait choisi de repousser le dossier ultérieurement, souhaitant d'abord jeter un oeil à des études d'impact, qui devraient être prêtes sous peu.

Pour le Nouveau Parti démocratique (NPD), les conservateurs récoltent simplement les problèmes qu'ils ont semé en faisant fi des accords internationaux comme Kyoto.

«Ils sont en train de payer le prix de leur incurie en environnement et le reste du monde est en train de réaliser que le Canada est le seul pays au monde qui recule en matière d'environnement plutôt que de progresser», a tranché Thomas Mulcair. Selon le chef de l'opposition officielle, M. Oliver va «continuer de défendre l'indéfendable».

Riposte à Al Gore

Dans son point de presse, M. Oliver a par ailleurs riposté à l'ancien vice-président Al Gore, qui a critiqué durement la stratégie canadienne de développement des sables bitumineux et sa promotion des pipelines dans une entrevue en fin de semaine au Globe and Mail.

Selon M. Gore, la «malédiction» de l'exploitation des ressources naturelles comporte de multiples dimensions, dont celle «d'endommager des paysages magnifiques, sans compter le problème central d'ajouter au rejet imprudent de pollution dans l'atmosphère de la Terre, comme s'il s'agissait d'un égout à ciel ouvert». À ses yeux, la position du Canada dans ce dossier finira par faire mal à ses relations avec les États-Unis.

Visiblement, M. Oliver n'a pas digéré la sortie de l'environnementaliste.

«Les commentaires d'Al Gore sur le Canada et sur nos ressources étaient très forts. Ils étaient exagérés et je pense qu'il est important de les contrer», a-t-il soutenu.

Selon lui, il n'est pas dans l'intérêt national du Canada de laisser ces «accusations inexactes» ne pas être corrigées.