L'un des principaux opposants américains au projet de pipeline Keystone XL, Bill McKibben, affirme que les propos du ministre des Ressources naturelles Joe Oliver publiés vendredi dans La Presse sont le «clou final dans le cercueil de la crédibilité du Canada au sujet des sables bitumineux».

M. McKibben est l'organisateur d'une manifestation qui a réuni des dizaines de milliers de personnes à Washington en février dernier contre le projet de pipeline, qui attend toujours l'approbation du président Barack Obama.

En entrevue à La Presse jeudi, le ministre Oliver a affirmé: «Je pense que les gens ne s'inquiètent pas autant qu'avant d'un réchauffement de 2 degrés.» Il a ajouté que, selon lui, «les scientifiques nous ont dit récemment que nos peurs (sur les changements climatiques) sont exagérées». Il n'a pas voulu citer quels scientifiques sont de cet avis.

M. Oliver a dit qu'il considérait que les changements climatiques étaient un «problème fondamental», tout en insistant sur l'urgence d'ouvrir de nouveaux marchés pour le pétrole lourd albertain.

Les propos de M. Oliver, qui ont été repris hier dans les médias anglophones au Canada, ont rapidement fait leur entrée dans le débat américain sur le projet Keystone XL.

«Ces commentaires compliquent la tâche du président Obama, s'il veut prétendre que le projet Keystone est défendable rationnellement», affirme M. McKibben en entrevue à La Presse.

«Le Canada s'est retiré de Kyoto et de la convention sur la désertification. Tout ce qu'il leur restait à faire était de faire une sortie complètement folle pour nier les changements climatiques, dit-il. Le Canada est l'un des pays les plus éduqués sur la planète et je crois que bien des Canadiens doivent avoir honte.»

«Je ne sais pas si je dois en rire ou en pleurer», affirme de son côté la députée néo-démocrate Megan Leslie, critique de l'opposition officielle en matière d'environnement.

Elle craint les répercussions internationales des propos de M. Oliver, y compris pour l'industrie canadienne.

«Je pense que ce que le ministre a dit est tellement irresponsable et dangereux, dit-elle. Je frissonne en pensant à la manière dont la communauté internationale va réagir.»

Elle croit que l'industrie pétrolière a besoin d'une réglementation plus forte, et pas seulement de nouveaux pipelines, pour avoir accès aux marchés internationaux, et que les propos de M. Oliver lui sont nuisibles.

«C'est incroyablement dommageable pour l'industrie. L'industrie pétrolière a besoin de la licence sociale. Elle a besoin de dire aux Canadiens qu'il y a des règles strictes et qu'elle s'y conforme.»