Les dirigeants de l'industrie du gaz de schiste ont de nouveau passé une soirée difficile, hier, pour la troisième fois en trois semaines, devant 600 personnes entassées dans une salle de 450 places.

Le président de l'Association pétrolière et gazière du Québec, André Caillé, a même quitté pendant 90 minutes l'assemblée d'information qu'il avait lui-même convoquée.

Les porte-parole de M. Caillé ont indiqué aux médias que la Sûreté du Québec considérait que le niveau d'agressivité était trop élevé et qu'il serait même préférable pour lui de quitter. «Je suis revenu quand même», a dit M. Caillé.

L'absence de M. Caillé n'a fait qu'augmenter la colère de plusieurs. Certains avaient fait une ou deux heures de route pour lui poser une question.

En son absence, les citoyens ont fortement applaudi l'intervention de Christian Vanasse, humoriste et conseiller municipal de Saint-Jude, en Montérégie.

Humains ou bélugas?

«Le gouvernement vient de décider qu'il y a un moratoire pour l'exploration gazière dans l'estuaire du fleuve, parce que, après des études sérieuses, on a trouvé que c'était un environnement fragile et complexe, a-t-il dit. Eh bien, moi aussi, j'habite dans un environnement fragile et complexe.»

«Considérez-vous que la vie, la santé et la sécurité des gens ici présents valent moins que celles des bélugas?»

La question a été reposée à André Caillé à son retour dans la salle: «La vie d'un citoyen est irremplaçable, elle vaut plus que tous les bélugas du Saint-Laurent», a-t-il alors répondu.

Plusieurs ont reproché à M. Caillé d'avoir dit que le débat était monopolisé par des écologistes.

«Je suis fâché de me faire dire qu'il y a juste des environnementalistes méchants qui viennent aux réunions, a dit un citoyen de Saint-Jean-Baptiste-de-Rouville. Ce sont des gens ordinaires qui sont inquiets.»

«M. Caillé a fait tout un travail ici pendant la crise du verglas, a-t-il ajouté. Que M. Caillé travaille pour nationaliser nos ressources en gaz, comme on l'a fait avec Hydro-Québec. On va se souvenir de vous pour des générations.»

«Pour moi, l'Assemblée nationale est souveraine, a répondu M. Caillé. Elle a le droit absolu de nationaliser la ressource. Mais j'ai accepté des responsabilités dans l'industrie.»

Daniel Chapdelaine, de Mont-Saint-Hilaire, a salué le «courage» des porte-parole de l'industrie. «Je veux saluer votre courage ce soir, a-t-il dit. Le gouvernement vous a envoyé au «batte» et je suis sûr qu'il n'y a pas un seul député ou ministre libéral qui aurait eu ce même courage. D'ailleurs, 90% des questions posées ici devraient être posées à l'Assemblée nationale.»

Les cinq députés péquistes de Montérégie ont assisté à la rencontre, dont Martine Ouellet, députée de Vachon. «Je comprends les gens d'être inquiets et fâchés, a-t-elle dit. Ce n'est pas normal de devoir écouter les explications de l'industrie. Ils veulent une information indépendante. Et la raison pour laquelle ils ne l'ont pas, c'est à cause de l'incompétence du gouvernement. Le gouvernement nuit au développement économique.»

Un élément factuel est ressorti pendant la soirée: un consultant de l'industrie, Jacques Perron, a affirmé qu'il recommanderait au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement de prévoir une distance de 500 mètres entre un forage gazier et la résidence la plus proche.