Soucieux d'avoir des partenaires fiables sur le climat, Pékin a réservé un accueil distant cette semaine au secrétaire à l'Énergie de Donald Trump, tandis que le président Xi Jinping accueillait chaleureusement le gouverneur de Californie, ardent défenseur des énergies propres.

En tournée asiatique juste après l'annonce que les États-Unis se retiraient de l'accord de Paris sur le climat, le secrétaire américain à l'Énergie Rick Perry s'est attaché à rassurer.

«Nous ne reculons pas (...) Les États-Unis ne renoncent pas à leur rôle de leader pour une planète propre», a-t-il plaidé lundi à Tokyo, selon l'agence Bloomberg. Avant d'ajouter: «Si les Chinois veulent prétendre à ce titre, ce sera ardu pour eux».

Plus diplomatiquement, M. Perry a vanté jeudi à Pékin les «opportunités extraordinaires» de coopération entre Chine et États-Unis sur les «énergies propres», lors d'un entretien avec le vice-premier ministre chinois Zhang Gaoli.

Reste à voir si l'administration Trump restera le partenaire privilégié de la Chine sur ce sujet.

Car, au mépris du protocole, le gouverneur de Californie Jerry Brown a pu, quant à lui, rencontrer mardi à Pékin le président Xi Jinping en personne, pour un long entretien très médiatisé.

Mieux, ils ont signé un protocole d'accord associant la Californie à la République populaire pour promouvoir conjointement les «technologies vertes», Xi Jinping disant «espérer un renforcement des synergies entre États américains et provinces chinoises».

Un camouflet pour Rick Perry? «Le message est que, quoique décide Trump, la Chine travaillera directement avec les villes et gouverneurs» au sein des États-Unis, décrypte Willy Lam, professeur à l'Université chinoise de Hong Kong.

«Réveiller les gens»

Rick Perry, farouche promoteur de l'énergie éolienne quand il était gouverneur du Texas et initialement favorable au maintien dans l'accord de Paris, était à Pékin pour participer à un forum ministériel sur les énergies propres aux côtés de délégations d'une vingtaine de pays.

Mais il s'y est fait extrêmement discret, s'exprimant très peu en public. À l'inverse, le gouverneur californien a multiplié les apparitions et les interviews tous azimuts pour vanter les efforts environnementaux de son État et revendiquer le soutien chinois.

«La Californie est engagée avec (les États) de Washington, New York et d'autres, pour agir davantage» sur le climat, «surtout à cause de M. Trump», a confié à l'AFP M. Brown, dont l'État serait la 6e économie mondiale s'il était indépendant.

De fait, une coalition lancée la semaine dernière réunit déjà une dizaine d'États américains et plus d'une centaine de villes du pays, engagés à réduire les émissions des États-Unis -- le deuxième plus gros émetteur de CO2 -- pour concrétiser l'accord de Paris.

«Nous n'allons pas assez vite pour éviter la catastrophe (...) J'essaie de réveiller les gens», et dans ce combat contre le réchauffement climatique, «la Chine est une alliée de taille, dotée de gigantesques ressources», insiste M. Brown.

«Déconnectée»

«Rick Perry est dans une position impossible. L'administration Trump est vraiment déconnectée et à contre-courant de la communauté mondiale, cela devient évident dans les réunions» internationales, grince Alex Perera, codirecteur de l'ONG WRI Energy Program.

Ainsi, si les États-Unis sont officiellement membres de «Mission Innovation», un groupe de 22 États engagés à doubler d'ici 2020 leurs investissements de R&D dans les énergies propres, la Maison-Blanche affiche des priorités budgétaires contraires.

M. Trump «semble vouloir revenir à la deuxième révolution industrielle» du XIXe siècle fondée sur le charbon, mais maires et gouverneurs américains, «restent eux arrimés à la modernité», tempère le vice-président de l'Union européenne (UE) Maros Sefcovic.

Une tendance universelle: le gouverneur Brown a ainsi animé mercredi une réunion de la «coalition Under2», un forum rassemblant 170 villes et régions de 33 pays (1,2 milliard d'habitants représentés), engagées à limiter strictement leurs émissions... indépendamment des gouvernements nationaux.

Logique, selon Helen Clark, directrice de l'ONG The Climate Group: après les négociations des chefs d'État, «c'est au niveau local que se concentreront les initiatives concrètes».