Le premier ministre Justin Trudeau a assuré ses homologues des quatre coins de la planète que le Canada allait en faire davantage pour s'attaquer aux changements climatiques, sans pour autant s'engager sur un calendrier précis pour mettre son plan en oeuvre.

C'est que les négociations entre les provinces et territoires sur le sujet pourraient être passablement houleuses.

Près de 150 chefs d'État et de gouvernement se sont attablés, lundi, pour le premier jour de travail du sommet des Nations unies sur les changements climatiques, dont l'objectif est de conclure un accord universel permettant de maintenir le réchauffement planétaire sous la barre des 2 degrés Celsius.

Dans un point de presse au Bourget, M. Trudeau a répété qu'il s'était fait élire avec le mandat de lutter contre les changements climatiques. Interrogé plusieurs fois sur le temps que cela prendra avant que ce plan soit mis en oeuvre au Canada, M. Trudeau a préféré rester vague.

S'adressant en salle plénière un peu plus tard, il a toutefois laissé entendre que ce serait davantage une question de «mois» que d'années.

«Nos provinces exercent un leadership au Canada en matière de changements climatiques et au cours des mois à venir, nous élaborerons un cadre pancanadien pour nous aider à mettre en oeuvre l'accord de Paris», a-t-il avancé dans son discours.

«Ce cadre comprendra des cibles nationales de réduction des émissions et, plus important encore, un plan concret pour les atteindre», a-t-il ajouté.

Faute de temps, M. Trudeau s'est présenté à Paris avec les cibles de réduction des émissions de gaz à effets de serre (GES) adoptées par le gouvernement conservateur précédent, soit une baisse de 30 pour cent par rapport à 2005, d'ici 2030. Son gouvernement a toutefois laissé savoir que c'était une cible «plancher», qui serait éventuellement bonifiée après une rencontre fédérale-provinciale dans 90 jours.

M. Trudeau a indiqué en plénière qu'il allait entre autres appliquer une «tarification du carbone» et qu'il considérait les changements climatiques «non seulement comme un défi, mais également comme une occasion historique» pour bâtir une économie verte.

«Le Canada est de retour. Nous sommes là pour vous aider. Pour construire un accord dont nos enfants et nos petits-enfants pourront être fiers», a-t-il conclu sous des applaudissements enthousiastes.

Sur place, le chef néo-démocrate Thomas Mulcair s'est montré impatient de voir M. Trudeau passer de la parole aux actes en ce qui a trait aux changements climatiques. «Le changement de ton est très apprécié de tous, y compris par moi-même. Mais en changeant de ton, il faut aussi changer de contenu», a-t-il signalé en marge de la COP21.

Débats chauds en vue

Plusieurs premiers ministres provinciaux étaient également sur place, dont celui du Québec, Philippe Couillard, qui prévoit que les débats seront «assez chauds» entre les différentes provinces quand viendra le temps de calculer les contributions de chacune au plan de lutte contre les GES. «On compte sur le gouvernement fédéral pour rallier les gens», a-t-il dit.

Il trouve qu'il serait «souhaitable» que beaucoup de travail soit abattu avant la réunion fédérale-provinciale dans trois mois. «Je pense qu'au moins on devrait s'entendre sur la marche à suivre, les méthodes de calcul également, et esquisser déjà, j'espère, les premiers éléments de contribution relative des régions les unes par rapport aux autres», a-t-il plaidé.

À l'opposé de M. Couillard, Brad Wall, le premier ministre de la Saskatchewan - la province la plus réticente à des mesures vigoureuses de réduction des GES - a confié être «un peu préoccupé» par l'intention de M. Trudeau de se doter de cibles plus ambitieuses.

«Nous avons besoin de faire plus dans notre province (...), mais nous devons aussi être soucieux de l'économie», a-t-il soutenu.

M. Trudeau est d'ailleurs conscient du rôle de médiateur qu'il aura à jouer. «Le Canada se gouverne mieux quand il y a de la coopération et de la collaboration entre tous les différents paliers de gouvernement», a-t-il noté en point de presse.

Le premier ministre a par ailleurs annoncé que le Canada investira un total de 300 millions de dollars dans le cadre de l'initiative «Mission Innovation», une mobilisation d'importants investissements publics et privés pour le développement des énergies propres initiée par les États-Unis et regroupant une vingtaine de pays. Des investisseurs privés comme le fondateur de Microsoft, Bill Gates, et celui de Facebook, Mark Zuckerberg, sont également impliqués dans le projet.

La somme de 300 millions de dollars avancée par Ottawa correspond exactement au montant qu'avait promis M. Trudeau en campagne électorale.

Grandes attentes

Dans son discours d'ouverture, le président français François Hollande a accueilli ses homologues avec des mots très forts, les laissant mesurer l'ampleur de leur responsabilité.

«Jamais l'enjeu d'une réunion internationale n'avait été aussi élevé. Car il s'agit de l'avenir de la planète, de l'avenir de la vie», a-t-il lancé d'entrée de jeu dans son allocution.

«Sur vos épaules repose l'espoir de toute l'humanité», a-t-il ajouté.

Il a salué le fait que pratiquement tous les pays du monde ont déposé leur plan d'action de lutte contre les gaz à effet de serre (GES). Mais c'est encore bien peu, car pour M. Hollande, «les déclarations d'intention ne suffiront pas. Nous sommes au bord d'un point de rupture. Paris doit être le départ d'une profonde mutation».

M. Trudeau a participé tout au cours de la journée à une série de rencontres bilatérales. Il a notamment rencontré le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, qui l'a invité en Israël, une invitation que le M. Trudeau a acceptée.

Il rentre à Ottawa après un voyage de six jours qui l'aura également mené à Londres, où il a visité la reine Elizabeth II, et à Malte, pour une rencontre du Commonwealth.