Samedi, le Canada est devenu le premier pays à quitter officiellement le protocole de Kyoto sur les changements climatiques. La décision a pris effet un an après l'avis officiel envoyé en décembre 2011 par le ministre de l'Environnement, Peter Kent. Le protocole de Kyoto a été adopté en 1997 et est entré en vigueur le 16 février 2005, après sa ratification par la Russie.

Q Qu'est ce que le protocole de Kyoto imposait au Canada?

R Le Canada n'a jamais été près d'atteindre son objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). Pour se conformer à Kyoto, le Canada devait diminuer ses émissions annuelles de GES à environ 550 millions de tonnes (Mt), soit 6% sous le niveau de 1990, pour la moyenne des années 2008 à 2012. À la signature du protocole de Kyoto, en 1997, les émissions canadiennes s'établissaient déjà à près de 700 Mt. En 2004, peu avant l'entrée en vigueur de Kyoto, elles atteignaient 751 millions de tonnes. En 2006, le vérificateur général du Canada jugeait «déconcertant» le fait que les plans d'action fédéraux adoptés en 2000, 2002 et 2005 n'entraîneraient pas de véritable baisse - ils ralentiraient seulement la hausse. Pour la période de 2008 à 2010, les émissions canadiennes sont demeurées au-delà de 700 millions de tonnes par année, en hausse de 17% par rapport à 1990.

Q Est-ce que certains pays ont atteint leur objectif de Kyoto?

R Parmi les grands pays industrialisés qui avaient, comme le Canada, des objectifs chiffrés à atteindre, plusieurs ont réussi à respecter le protocole de Kyoto. L'Europe, dans son ensemble, a largement dépassé son objectif. Aidée par l'effondrement économique de l'ex-RDA, l'Allemagne est passée de 1246 Mt en 1990 à 936 Mt en 2010, une baisse de 25%. La France a enregistré une baisse de 5% entre 1990 et 2010. Le Royaume-Uni a réussi à réduire ses émissions annuelles de 23%.

La Norvège, pays producteur de pétrole, affiche une hausse de 8%, alors que Kyoto lui permettait une augmentation de 1%. Les émissions du Japon sont stables, alors qu'elles devaient diminuer de 6%. Le pays refuse de s'engager dans un Kyoto 2. L'Australie - pays dont l'économie ressemble le plus à celle du Canada - reste participante à un Kyoto 2, même si ses émissions étaient en hausse de 30% entre 1990 et 2010.

Q Quelle est la suite de Kyoto?

R Selon ce qui a été convenu à Doha, Kyoto survivra - mais amoindri - pour une deuxième période. Un certain nombre de pays, qui représentent 15% des émissions mondiales, se sont engagés à continuer de réduire la pollution. Au total, l'objectif est d'atteindre le chiffre de -18% en 2020 par rapport à 1990, mais certains pays sont déjà plus ambitieux. «L'Europe a déjà un objectif de -20% pour 2020 et, avec les mesures qui sont déjà en place, ils se dirigent vers -25%», affirme Patrick Bonin, de Greenpeace.

En 2015, après le dépôt du prochain rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), l'ensemble des pays signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, dont le Canada, doivent réexaminer leurs engagements à la lumière des nouvelles données scientifiques.

Q Que proposent actuellement les partis politiques fédéraux?

R Le Parti conservateur se félicite de la cible actuelle du Canada, établie à Cancún en 2009. Mais elle équivaut en fait à une hausse de 3% des émissions de GES en 2020 par rapport à 1990. En outre, la réglementation en place ne s'applique pas encore au secteur du pétrole et du gaz, même si la principale cause de l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre (GES) au Canada est l'exploitation croissante des sables bitumineux. Le Nouveau Parti démocratique (NPD) propose un système de plafonnement et d'échange des émissions de gaz à effet de serre, de façon à atteindre une cible de réduction de 25% pour 2020 et de 80% en 2050, toujours par rapport à 1990. La cible du Parti vert est plus ambitieuse, soit 30% de réduction en 2020 par rapport à 1990, et 85% en 2040. Le Parti vert et le NPD proposent tous deux d'abolir les subventions à l'industrie des hydrocarbures. Dans sa plateforme de 2011, le Parti libéral du Canada proposait une cible de réduction à long terme: d'ici 2050, une diminution de 80% des émissions par rapport à leur niveau de 1990. Le concept de taxe sur le carbone a aujourd'hui disparu des propositions libérales officielles.