Environnement Canada craint que les efforts du gouvernement Harper pour encourager ses fonctionnaires à examiner de plus près les risques et possibles répercussions des changements climatiques ne tombent dans l'oreille d'un sourd.

C'est du moins ce que révèle une note d'Environnement Canada datée de juillet 2011, et dont La Presse Canadienne a obtenu copie en vertu de la Loi d'accès à l'information.

Un cadre de travail spécial sur l'adaptation aux changements climatiques, introduit dans le budget de l'an dernier, invite les fonctionnaires fédéraux à songer quotidiennement aux impacts que leurs décisions auront sur le réchauffement climatique dans les prochaines années.

L'objectif visé par le Cadre stratégique fédéral sur l'adaptation est de s'assurer que les fonctionnaires saisissent les risques liés aux perturbations environnementales, de sorte que les politiques fédérales et les programmes instaurés dans le dossier puissent résister aux impacts répertoriés sur le territoire. La fonte du pergélisol mettant en péril les infrastructures du Nord canadien, par exemple, ou encore l'acidification des océans tuant les saumons rouges, sont du nombre.



Pas assez contraignant

La note d'Environnement Canada révèle toutefois les craintes de l'équipe chargée de l'application de ce cadre de travail, qui s'inquiète des possibilités que la mesure ne soit reléguée sur une tablette dans certains secteurs du gouvernement ne se préoccupant pas, de façon générale, des impacts environnementaux de leurs décisions.

«Sans l'instauration d'un mécanisme obligatoire de rapport, le cadre et l'importance de considérer et planifier les impacts que pourraient avoir les changements climatiques sur la capacité du gouvernement à mener à bien ses responsabilités pourraient être perdus dans certains ministères et agences pour qui ce n'est pas une priorité», peut-on lire dans la note.

L'ajout d'un mécanisme contraignant à cette mesure devait être sujet à des discussions «ultérieures», souligne-t-on dans la note.

Un porte-parole d'Environnement Canada, qui supervise les opérations pour tenter de donner vie à ce cadre, affirme que les rapports sur les rapports sur les résultats ne seront pas essentiels, puisque les ministères et agences sont «engagés» dans l'intégration des vérifications de nature environnementale lors de la prise de décision.

«Considérant ce contexte, un mécanisme obligatoire de rapports sur le cadre stratégique n'est pas nécessaire pour accomplir les objectifs visés par le cadre», a écrit Mark Johnson dans un courriel.

La porte-parole néo-démocrate en matière d'environnement, Megan Leslie, estime que le cadre stratégique est inoffensif sans une telle exigence.

«Je ne comprends pas comment cela pourra fonctionner s'il n'y a pas un quelconque suivi à effectuer», a-t-elle analysé.

Le Cadre stratégique fédéral sur l'adaptation prévoit par ailleurs que les outils et la connaissance tirés de ce processus seront partagés pour aider les Canadiens à mieux vivre les changements climatiques.

Le budget de 2011 allouait près de 150 millions $ à l'élaboration de dix prédictions climatiques et mesures d'adaptation ciblant neuf ministères et agences.

Le cadre existe depuis 2003, mais il a été remodelé à la suite du dépôt à l'automne 2010 d'un rapport du commissaire à l'environnement, Scott Vaughan.

M. Vaughan avait alors critiqué Ottawa pour ne pas avoir établi de priorités claires sur l'adaptation aux changements climatiques, relevant au passage que le gouvernement Harper n'avait pas respecté sa promesse de 2007 d'élaborer un plan en la matière.