Les dirigeants européens réunis en sommet à Bruxelles ont revu à la baisse leurs ambitions en vue de la conférence de Cancun en décembre sur le climat et se projettent déjà dans l'avenir pour tenter d'assurer la prolongation du protocole de Kyoto.

«Cancun, c'est mort», a affirmé à l'AFP, geste explicite à l'appui, Nikolaj Dongielewicz, bras droit du premier ministre polonais, Donald Tusk.

Les 27 chefs d'État et de gouvernement de l'UE ont adopté un texte aux ambitions modestes qui réaffirme pourtant qu'«il est plus que jamais urgent de progresser dans la lutte contre le changement climatique».

À un mois de la réunion, les négociations sont encalminées et aucun accord contraignant ne sera conclu au Mexique, a admis le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon.

La cause est entendue et les dirigeants européens considèrent désormais Cancun comme «une conférence d'étape».

«Nous n'avons pas d'autre choix que d'avancer pas à pas et cela ne dépend pas de l'UE», a déploré le chef du gouvernement espagnol José Luis Zapatero.

«S'il doit y avoir un accord contraignant, ce sera un an plus tard en Afrique du Sud, 15 jours après le sommet du G20 en France», soutiennent les Français.

Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi s'est félicité que l'UE abandonne sa prétention de s'ériger en modèle et a ironisé sur la tendance de certains de ses partenaires à vouloir jouer les «Don Quichotte».

Le document adopté par les dirigeants européens ne fait pas référence à un objectif de réduction de 30% des émissions de gaz à effet de serre et s'en tient à l'objectif initial d'une réduction de 20% par rapport à leurs niveaux de 1990 en 2020, a fait remarquer M. Berlusconi.

«Nous n'imposerons des contraintes supplémentaires à nos entreprises que si les États-Unis, la Chine, le Brésil et l'Inde font de même», a-t-il insisté.

Les dirigeants européens ont par ailleurs confirmé leur engagement de financer à hauteur de 2,4 milliards d'euros par an pendant trois ans, de 2010 à 2012, des projets pour aider les pays les plus pauvres à lutter contre les conséquences du réchauffement du climat.

Mais depuis l'échec du sommet de Copenhague en décembre 2009, ils se montrent de plus en plus désabusés.

«Nous devons nous concentrer sur ce qu'il est réaliste d'obtenir», plaide le président de la Commission José Manuel Barroso.

Et pour les Européens, le réalisme impose de miser désormais sur une prolongation du protocole de Kyoto, seul instrument international contraignant pour réduire les gaz à effet de serre, qui arrive à échéance en 2012.

Le problème est que les plus gros pollueurs de la planète, la Chine et les États-Unis, ne sont pas liés par ce texte qu'ils ont pourtant signé. Ils n'ont aucune obligation, contrairement aux Européens, et refusent de s'en voir imposer.

«Tant que les Américains ne bougeront pas, les autres grands pollueurs ne bougeront pas», déplore la commissaire au Climat, Connie Hedegaard.

De plus en plus de voix s'élèvent donc au sein de l'UE pour un changement de stratégie.

«Nous ne devons plus lier nos efforts à ceux des autres, mais à nos intérêts», soutient l'Allemand Jo Leinen, président de la Commission environnement du Parlement européen.

Car si les Chinois ne bougent pas dans les négociations internationales, ils ne restent pas inactifs. «En moins de dix ans, ils ont pris 50% du marché mondial de l'énergie du vent, et si l'Europe ne réagit pas, elle va perdre la bataille de l'innovation», avertit Connie Hedegaard.