L'agriculture organique n'est pas plus nutritive ni moins polluante que l'agriculture traditionnelle, selon deux nouvelles études. Mais elle peut être intéressante pour ceux qui craignent de ne pas assez cuire leur viande ou qui ne font pas confiance aux normes gouvernementales en matière de résidus de pesticides.

«J'ai été assez surprise de constater que la pollution par kilo de nourriture est plus élevée pour l'agriculture organique», explique l'auteure de l'étude environnementale, Hanna Tuomisto de l'Université d'Oxford, en entrevue depuis Vienne où elle participe à un congrès.

«Au départ, je devais comparer le prix des aliments bios et conventionnels en tenant compte des coûts externes, comme la pollution, qui ne sont pas pris en compte parce que les agriculteurs n'ont pas à compenser financièrement la pollution qu'ils causent. Je tenais pour acquis que les prix seraient alors semblables, mais je n'avais pas tenu compte du problème du rendement. La pollution par hectare est moins élevée avec le bio. Mais comme le bio est moins productif, le conventionnel est finalement moins polluant.»

L'étude de Mme Tuomisto, qui travaille maintenant pour l'Institut pour l'environnement de l'Union européenne, a été publiée dans le Journal of Environmental Management. La biologiste d'origine finlandaise a fait une méta-analyse de 71 études européennes [une méta-analyse permet de déterminer quelles conclusions peuvent être tirées d'un groupe d'études souvent contradictoires]. Seule bonne nouvelle pour le bio: la consommation d'énergie du bio par kilo de nourriture est moins élevée.

Pour Alain Rioux, directeur général de la Filière biologique du Québec, un regroupement d'entreprises du secteur, l'étude de Mme Tuomisto s'applique difficilement au Québec. «Ici, le rendement du bio s'améliore et s'approche de celui de l'agriculture conventionnelle.»

M. Rioux cite également une étude remontant à octobre 2011 du ministère québécois du Développement durable, qui concluait que le bio a moins d'effets négatifs sur l'environnement. Cette étude n'a toutefois pas été publiée dans une revue avec comité de révision (peer review).

Bactéries multirésistantes aux antibiotiques

L'autre étude, une méta-analyse publiée par des chercheurs de l'Université Stanford en Californie dans la revue Annals of Internal Medicine, conclut que le porc et le poulet organiques ont 30% moins de bactéries multirésistantes aux antibiotiques que ceux de l'élevage traditionnel. Ces bactéries sont dangereuses si on ne cuit pas assez la viande. Les résidus de pesticides sur les fruits et légumes sont également 30% moins élevés. Par contre, si on ne prend que la proportion de fruits et légumes dont les résidus dépassent les normes, il n'y a pas de différence entre le bio et le traditionnel.

Isabelle St-Germain, d'Équiterre, estime que les normes sur les résidus de pesticides ne sont pas mises à jour assez souvent. Quant à Alain Rioux, de la Filière biologique, il avance que les cocktails de pesticides aggravent leur effet, un effet dont les normes ne tiennent pas encore compte.