Assis aux urgences de l'hôpital Ibn Nafis, Saadi Ibrahim, appuie un masque à oxygène sur sa bouche. «Je ne supporte pas ces tempêtes de sable, je n'arrive pas à respirer», dit-il, parlant difficilement avec un léger sifflement dans la gorge.

 Depuis le début de l'été, l'Irak est frappé presque quotidiennement par des tempêtes de sable, qui rendent la vie des Irakiens impossible: les hôpitaux traitent des centaines de cas d'insuffisance respiratoire et l'aéroport international doit interrompre tous ses vols par manque de visibilité. Les jours de fortes tempêtes, les Irakiens déambulent dans la rue en portant des masques chirurgicaux vendus 250 dinars (20 centimes de dollar) par des marchands à la sauvette.

 

Si les précédentes années, ce phénomène climatique était présent, il est devenu d'une fréquence inhabituelle en 2009. «Jamais je n'ai eu de problème comme cela. Il y avait des tempêtes de temps en temps. Cette année, je souffre vraiment», poursuit Saadi, 46 ans, en prenant de grandes bouffées d'oxygène dans son masque.

 

La vie des Irakiens est rendue d'autant plus difficile que l'électricité est toujours rare. Impossible de laisser les vitres fermées, malgré le sable, car la température dépasse les 50 degrés.

 

«Chaque fois qu'il y a une tempête de sable, je sais que je vais avoir des problèmes respiratoires. Nous n'avons que quelques heures d'électricité à la maison et on doit laisser les portes et les fenêtres ouvertes. Il fait trop chaud», poursuit un autre patient, Amin Hussein.

 

Selon les autorités irakiennes, la désertification du pays et la sécheresse qui dure depuis deux ans ont amplifié le phénomène des tempêtes de sable, qui touche toute la région, de l'Arabie saoudite à l'Iran. «Dans les années 1990, il y avait huit jours de tempêtes de sable par an. Aujourd'hui, pas une semaine ne passe sans tempête», affirme Ibrahim Charif, responsable du département luttant contre la désertification au ministère de l'Environnement.

 

«L'Irak est une zone aride ou semi-aride. L'absence de précipitation pendant plusieurs saisons a détruit la végétation. Et quand il n'existe plus de végétation pour retenir la terre ou le sable, le vent les emporte», formant d'immenses nuages de poussière qui se déplace dans les villes, explique-t-il.

 

Selon lui, les conflits armés qui touchent l'Irak depuis le début des années 1980 sont aussi à blâmer: les véhicules militaires ont détruit les zones vertes du sud et du centre, labourées par les chenilles, offrant une autre source de poussière au Shamal, le vent qui souffle sur l'Irak en été.

 

La seule solution, assure M. Charif, pour lutter contre le phénomène est de protéger et faire renaître la végétation dans le pays, qui a vu ses palmeraies réduites des deux tiers, passant de 36 millions de palmiers à 12 millions.

 

«L'Irak doit avoir une stratégie générale mise en place par les ministères de l'Agriculture, de l'Environnement, de l'Education, de l'Eau et des Sciences. À l'heure actuelle il y a trop de petits projets qui ne sont pas coordonnés», dit-il.

 

Mais le problème est aussi régional. Le voisin iranien blâme ainsi l'Irak pour ses tempêtes de sable. Le Premier ministre Nouri al-Maliki a signé récemment un accord avec une association iranienne de défense de l'environnement.

 

«Le Premier ministre a assuré que le gouvernement apporterait toute son aide au ministère de l'Environnement pour combattre le problème des tempêtes de sable qui affecte l'environnement et la santé» des Irakiens, a ajouté un communiqué de son bureau.

 

Mais dans un pays en convalescence comme l'Irak, l'environnement risque toutefois d'être le laissé pour compte face aux autres défis urgents comme la réconciliation nationale, la reconstruction ou la lutte contre les insurgés.