Plus de 70 chercheurs et scientifiques internationaux ont lancé vendredi à Pisco, sur les côtes péruviennes, la plus grande campagne d'étude océanographique dans le sud-est de l'Océan Pacifique en mettant à l'eau un sous-marin robot pour analyser le réchauffement de la planète qui pourrait bien se traduire là.... par un refroidissement.

«C'est la première fois que l'on mène une étude aussi poussée dans le sud-est de l'Océan Pacifique», déclare à l'AFP l'océanographe français Alexis Chaigneau, en soulignant que ces recherches faisaient partie du grand projet international VOCALS.

Ce projet, financé en majorité par les États-Unis, mobilise 150 scientifiques internationaux (océanographes, biologistes marins, climatologues...), de 40 instituts et universités (États-Unis, France, Grande Bretagne...) pour analyser le climat, la composition de la mer, l'atmosphère et les particularités des courants.

Outre le petit sous-marin jaune, «Pythéas», les chercheurs disposeront à la mi-octobre de plusieurs avions et bateaux de recherches, dont un navire américain, des bouées fixes, des ballons sondes, pour étudier l'Océan Pacifique de Pisco (250 km au sud de Lima) à Arica, au nord du Chili.

Les spécialistes ont mis à l'eau en face de Pisco le petit sous-marin pour effectuer durant trois mois des relevés de température, salinité et paramètres physiques.

L'engin est une sorte de «glider», un planeur sous-marin, de deux mètres de long et pesant une cinquantaine de kg. Ressemblant à une torpille, Pythéas se déplace «à la vitesse d'un nageur, plonge jusqu'à 200 m et ne consomme pas plus que deux ampoules de guirlande (d'une puissance de deux watts), explique son pilote, M. Chaigneau, de l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD, France) et du laboratoire français LOCEAN.

Le submersible n'a pas de propulsion moteur et avance avec un changement du centre de gravité. Il possède une antenne sur la queue pour transmettre et recevoir des ordres, explique-t-il.

«Le trajet étant perpendiculaire à la côte, le risque est de se faire pêcher par des filets puisque Pythéas va évoluer entre 10 km et 120 km des côtes», craint le chercheur qui travaille avec une équipe formée de Jacques Grelet (IRD), Carmen Grados (IMARPE, Pérou) et l'océanographe Pierre Testor (LOCEAN/CNRS), un spécialiste en robot sous-marin.

Le sous-marin plongera environ deux heures puis remontera à la surface pour transmettre ses données. Il devra étudier la composition de l'eau, la luminosité dans cette région très particulière traversée par le courant froid de Humboldt. C'est la rencontre de ce courant froid et profond avec les eaux plus chaudes de la surface qui produit un plancton particulièrement riche et en font les eaux les plus poissonneuses de la planète.

Pierre Testor précise que le planeur sous-marin se guide depuis la terre au moyen d'un ordinateur qui passe ses instructions par satellite.

Un des objectifs de cette vaste enquête scientifique est de comprendre les interactions de l'Océan et de l'atmosphère dans cette région unique possèdant un courant froid sur les côtes chiliennes et péruviennes et la formation de nuages permanents sur une partie des zones cotières et désertiques.

«Il faut en analyser les effets sur les changements du climat» et le réchauffement global, ajoute M. Chaigneau en expliquant que l'une des hypothèses à vérifier est que le réchauffement de la planète produit un effet contraire dans cette région en refroidissant le sud-est de l'Océan Pacifique.

«Nous avons d'ailleurs des informations scientifiques prouvant un refroidissement du climat dans cette zone de l'Océan», affirme-t-il.