Le projet d'une société britannique de lâcher des hordes de moustiques génétiquement modifiés dans le sud de la Floride pour réduire le risque de maladies comme la dengue provoque une levée de boucliers parmi les résidents de l'État, inquiets de l'impact sur l'environnement.

Ainsi, plus de 145 000 personnes ont à ce jour signé une pétition pressant les autorités de s'opposer à ce que l'État devienne «un lieu d'expérimentation avec ces insectes mutants».

La firme Oxitec explique vouloir tester cette approche pour réduire les populations non autochtones de moustiques Aedes aegypti dans le sud de la Floride qui sont le principal vecteur de la dengue et du virus chikungunya.

Les moustiques mâles ont été génétiquement modifiés en laboratoire pour rendre impossible la survie de leur progéniture.

«Les moustiques mâles qui seront lâchés en Floride et leur progéniture mourront et ne subsisteront pas dans l'environnement», assure Oxitec sur son site internet décrivant cette approche «comme une nouvelle arme contre ces insectes.»

Seules les femelles piquent, car elles sont hématophages, non pas pour se nourrir, mais pour obtenir dans le sang la source de protéines nécessaires à la fabrication des oeufs.

Sinon, comme les mâles, elles se nourrissent de nectar de fleurs.

Si l'Agence américaine des médicaments (Food and Drug Administration) donne son feu vert à ce projet, Oxitec pourrait commencer à libérer ces moustiques OGM dans la nature au cours des prochains mois à raison de plusieurs fois par semaine.

Des essais effectués, au Brésil notamment, ont montré une réduction de plus de 90% des populations de moustiques, selon Oxitec.

Sur la base de ces résultats, le Bureau de contrôle des moustiques de l'archipel des Keys de Floride a accepté de travailler avec Oxitec qui y a construit un laboratoire d'élevage de moustiques OGM.

Dengue et chikungunya

Les opposants à ce projet mettent en avant leurs inquiétudes pour l'environnement et surtout de l'impact potentiel sur les humains et d'autres espèces animales.

Ils s'interrogent sur le fait qu'il n'y ait pas un groupe d'experts indépendants qui examine les recherches sur les moustiques OGM de la firme britannique.

Les auteurs de la pétition font valoir qu'il n'y a pas eu de cas de dengue dans les Keys depuis des années, ce qui montre l'efficacité des méthodes actuelles de contrôle des populations de moustiques.

Cependant, les responsables sanitaires estiment qu'une réapparition de la dengue est encore possible tout comme le chikungunya, deux virus qui provoquent de fortes douleurs articulaires et de la fièvre.

Ainsi en juillet 2014, un homme en Floride qui n'avait pas récemment voyagé à l'étranger est devenu la première personne aux États-Unis à être infecté dans le pays par le chikungunya.

L'idée de relâcher dans la nature des moustiques rendus stériles n'est pas nouvelle, rappelle Joe Conlon, un expert de l'«American Mosquito Control Association» qui n'a pas officiellement pris position sur le projet Oxitec en Floride, mais qui attribue ce mouvement d'opposition surtout à l'ignorance scientifique.

Dans les années 50, les scientifiques avaient pu rendre stériles en les irradiant des lucilies bouchères mâles, un insecte dont les larves se nourrissent exclusivement de chair vivante, avant de les libérer en Floride. L'opération a été un vrai succès pour réduire les populations de ces diptères.

L'irradiation ne peut pas être utilisée sur les moustiques qui sont trop fragiles, mais la modification génétique peut aider à freiner leur reproduction surtout à proximité des endroits habités près de l'eau, juge Joe Conlon.

Cette technique ne permettra pas une éradication totale des moustiques, mais pourrait peut-être réduire les quantités d'insecticide chimique dans l'environnement, selon lui.