L'industrie éolienne s'inquiète que la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, remette en question l'octroi de 700 MW prévus dans la stratégie énergétique 2006-2015.

En marge du colloque de l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable, la ministre a indiqué que certains appels d'offres prévus pourraient ne pas se faire. «Il devra y avoir de nouveaux projets qui se réaliseront, mais nous sommes en train d'analyser l'ampleur, et comment les choses vont se dérouler», a-t-elle affirmé.

Selon la stratégie énergétique, 4000 MW devaient être commandés. Il en reste 700. «Pour qu'ils soient raccordés et mis en service d'ici 2015, il faut les annoncer maintenant», prévient Jean-François Samray, PDG de l'Association québécoise de production d'énergie renouvelable.

Les ministres responsables du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, Pascal Bérubé et Gaétan Lelièvre, ont déjà indiqué à leurs électeurs que les appels d'offres seront bientôt lancés. Mais la ministre Ouellet n'est pas certaine qu'elle commandera l'ensemble des 700 MW promis. La raison: à cause de la chute du prix de l'énergie et des surplus énergétiques, l'éolien est produit à perte. Hydro-Québec prévoit d'ailleurs que cela lui fera perdre 1,5 milliard d'ici 2020. C'est d'ailleurs «essentiellement» à cause de ces pertes que Mme Ouellet dit avoir mis fin au programme des minicentrales hydroélectriques.

L'éolien est encore plus déficitaire que les minicentrales. La ministre affirme toutefois que les deux filières ne se comparent pas. «On a créé une industrie manufacturière (des produits éoliens) au Québec. Je pense qu'il est important de la maintenir», insiste-t-elle.

Elle veut commander assez de mégawatts pour s'assurer que les manufacturiers de l'industrie éolienne au Québec obtiennent un carnet de commandes qui assurera leur santé financière, sans toutefois perdre plus d'argent que nécessaire avec cette filière. «Nous analysons pour voir quels seront les besoins additionnels nécessaires pour maintenir l'industrie manufacturière au Québec. (...) Nous allons travailler pour maintenir l'industrie manufacturière, parce que nous avons la profonde conviction que dans le futur, l'éolien fait partie de la solution. Mais nous avons une période de transition à traverser, qui est une période de surplus, et l'analyse sera dans ce sens-là», résume-t-elle.

En Ontario, l'industrie éolienne est déficitaire de 200 millions par année à cause de la chute des prix. Mme Ouellet n'était pas en mesure de chiffrer le coût pour le Québec. M. Samray juge réducteur de simplement comparer le coût de production au prix de vente. Il faut aussi comptabiliser la création d'emplois et les recettes fiscales. «Une étude de Secor (commandée par son association) a démontré que le secteur éolien rapporte 500 millions de dollars par année à l'économie du Québec», affirme-t-il. Selon cette étude, cette grappe industrielle crée aussi 5000 emplois.

Dans un communiqué alarmiste, l'Union des municipalités du Québec prévenait récemment que l'annulation des appels d'offres «résulterait des fermetures d'usines et la perte de milliers d'emplois un peu partout en province».