Vendredi, la centrale de Gentilly-2 a fourni son dernier kilowattheure au réseau d'Hydro-Québec, ce qui marque la fin de l'industrie nucléaire au Québec.

Mais le débat sur la gestion des déchets ne fait que commencer.

Le déclassement de Gentilly-2 coûtera 1,8 milliard de dollars étalés sur plus de 50 ans, selon les prévisions actuelles. Mais les solutions définitives à des aspects importants de ce déclassement ne sont pas encore en place.

Le combustible irradié produit par l'ensemble des 22 réacteurs CANDU au Canada doit être entreposé sous terre, dans un lieu qui reste à déterminer, mais qui doit se trouver dans une formation géologique profonde du Bouclier canadien.

Au cours de sa vie utile, la centrale Gentilly-2 a produit 120 000 grappes de combustible, qui pèsent environ 2900 tonnes et font 1000 m3 de volume. Elles sont entreposées sur le terrain de la centrale.

Une provision existe dans les comptes d'Hydro-Québec pour les coûts d'entreposage définitif du carburant, même si on ignore à combien se chiffrera la facture.

Une vingtaine de communautés en Ontario se sont montrées intéressées par le projet de dépôt nucléaire permanent, qui entraînera des milliards de dollars d'investissements.

Mais le démantèlement de Gentilly-2 produira aussi d'autres déchets. On devra se débarrasser de pièces d'équipement faiblement ou modérément radioactives d'un volume total de 6855 m3, selon une évaluation du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) réalisée en 2005.

Pour ce type de déchets, aucune solution pancanadienne n'est prévue. L'Ontario, qui compte 20 réacteurs CANDU, planifie un lieu d'entreposage permanent à 680 m de profondeur près de la centrale de Bruce, au bord du lac Huron. Mais cette installation ne sera pas accessible aux autres provinces.

Dans son rapport, le BAPE affirme qu'«Hydro-Québec devrait proposer une solution réaliste et acceptable socialement pour gérer à long terme les déchets radioactifs de la centrale de Gentilly-2».

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TOUR DU MONDE RADIOACTIF

Malgré les 435 réacteurs nucléaires dans une trentaine de pays, rares sont les États qui ont réussi à régler l'épineux problème des déchets nucléaires. Difficile de trouver un endroit qui deviendra synonyme de danger pendant 100 000 années.

États-Unis > Avec 104 réacteurs, les États-Unis sont la première puissance nucléaire mondiale. Mais la solution pour l'entreposage de ses 67 000 tonnes de déchets hautement radioactifs leur échappe toujours. Approuvé en 2002, le projet Yucca Mountain, au Nevada, a été abandonné en mars 2011. Le sénateur Harry Reid s'y est opposé avec succès. La découverte en 2007 d'une faille géologique sous le lieu prévu lui a donné un argument de poids. Depuis, une commission a souligné l'urgence de trouver un autre endroit. Un fonds de 27 milliards financé par les entreprises d'électricité existe à cette fin.

France > Aucun pays n'est plus dépendant de l'énergie nucléaire que la France, qui a accumulé 1,3 million de mètres cubes de déchets. C'est l'un des rares pays à traiter et réutiliser une partie de ses déchets comme combustible. Mais le recyclage a ses limites. En 2009, les autorités françaises ont choisi une zone à 250 km à l'est de Paris, aux limites de la Meuse et de la Haute-Marne, pour le projet d'enfouissement appelé Cigéo. Il doit coûter au moins 13,5 milliards, selon une évaluation réalisée en 2005.

Japon > Le Japon a vécu plus que sa part de désastres nucléaires. Avec ses 50 réacteurs, il est la troisième puissance nucléaire civile mondiale. Mais il n'a nulle part où déposer ses déchets. En 2002,  le gouvernement a sollicité plus de  3000 municipalités en ce sens, sans succès. Il semble que le risque sismique qui menace tout l'archipel complique le choix d'un lieu.

Finlande > Loin d'être une grande puissance nucléaire, avec ses quatre réacteurs, la Finlande est peut-être le pays le plus avancé sur la question des déchets. Elle dispose déjà d'un lieu pour ses déchets à faible ou moyenne radioactivité. Pour le combustible irradié, l'excavation du dépôt d'Onkalo a commencé en 2004 et se poursuivra jusqu'en 2015, pour une mise en service en 2020. L'usage prévu est de 100 ans.