La Pologne envisage d'investir massivement dans les gaz de schiste, une éventuelle source très importante d'énergie, mais aussi de produits chimiques dangereux pour l'environnement, afin de se libérer de la dépendance aux importations russes et donner un coup de pouce à son économie.

L'utilisation du gaz de schiste, qui a débuté il y a un certain temps aux États-Unis et au Canada, est controversée en raison de son impact sur l'environnement, et sera l'un des principaux points à l'ordre du jour lorsque le président américain Barack Obama visitera Varsovie, les 27 et 28 mai prochains.

Certains États américains ont dû resserrer leurs normes environnementales après que des niveaux élevés de méthane aient été détectés dans l'eau potable, tandis que la France a récemment mis un projet semblable en veilleuse.

La Pologne ne semble toutefois pas inquiétée par les risques, affirmant qu'elle ne peut se permettre d'ignorer une telle réserve d'énergie. Mercredi, des experts polonais et américains se rencontraient à Varsovie pour discuter du projet.

Une étude menée récemment par la U.S. Energy Information Administration estime les réserves polonaises à quelque 5300 milliards de mètres cubes, assez pour subvenir pendant des décennies aux besoins annuels de 14 milliards de mètres cubes du pays.

Actuellement, environ 70% des besoins en gaz sont comblés par les importations de Russie.

Les compagnies possédant de l'expérience en extraction de gaz de schiste aux États-Unis et au Canada ont obtenu des permis pour forer en Pologne. Lane Energy Poland creuse actuellement un troisième puits dans le nord, après des résultats prometteurs dans les deux premiers, a déclaré le directeur commercial et responsable de la Pologne de l'entreprise, Kamlesh Parmar.

Pour libérer le gaz qui a été emprisonné dans des roches poreuses profondément dans le sol depuis des millions d'années, les compagnies forent de profonds puits pour fractionner la roche, et pompent d'importantes quantités d'eau additionnée de sable et de produits chimiques pour empêcher les fissures de se refermer. Cette technique est appelée fracturation hydraulique.

Les énormes quantités d'eau requises pourraient poser problème en Pologne, où l'or bleu ne coule pas en abondance.

Pendant ce temps, des écologistes affirment que les produits chimiques utilisés peuvent être dangereux pour l'environnement et les humains. Près de certains puits américains, des concentrations élevées de méthane ont été découvertes dans l'eau du robinet de certains ménages.

Des législateurs texans, où le gaz de schiste est extrait à grande échelle, ont approuvé la semaine dernière la première loi américaine qui oblige les compagnies de forage à divulguer publiquement le nom des composés chimiques qu'elles utilisent.

En Europe, une porte-parole du commissaire européen à l'énergie, Günther Oettinger, a indiqué que le rôle potentiel du gaz de schiste dépendrait du fait que les entreprises se conforment ou non aux lois européennes, principalement celles touchant la protection de l'environnement. Les pays européens observent de près les projets américains, afin d'obtenir des conseils sur les façons de minimiser les risques, a déclaré Marlene Holzner.

Le Sénat français a récemment franchi la première étape législative en vue d'une interdiction de l'extraction des gaz de schiste. L'Allemagne a quelques projets de test en cours, mais il y a également des inquiétudes concernant l'impact environnemental.

Les analystes affirment cependant que la Pologne ne peut se permettre d'ignorer une telle source d'énergie. Selon Andrzej Knigawka, directeur chez ING, il n'y a pas d'autre solution. Pour lui, il serait erroné de ne pas chercher à exploiter ces ressources, puisque ces même gaz ont eu un important impact sur la balance énergétique des États-Unis, en faveur de l'indépendance dans ce domaine.