La glace sous la calotte de l'Antarctique fond régulièrement et forme des poches d'eau qui regèlent en profondeur, créant jusqu'à la moitié de l'épaisseur totale de la glace, selon une étude publiée jeudi qui pourrait bouleverser la compréhension de la glaciation.

Cette découverte pourrait en effet modifier comment les scientifiques expliquent l'accroissement des couches de glace, leurs mouvements et leurs réactions au changement climatique, soulignent ces chercheurs dont l'étude paraît dans la version en ligne de la revue américaine Science.

Les glaciologues ont toujours pensé que les couches de glace dans l'Antarctique se formaient depuis la surface et s'accroissaient par le dessus, avec l'accumulation de la neige au cours des millénaires.

Mais jusqu'à récemment les scientifiques ignoraient ce qui se passait en profondeur.

«Nous pensions généralement aux couches de glace comme à la fabrication d'un gâteau à savoir qu'on commence par une couche qui s'ajoute à une autre couche», explique Robin Bell, un géophysicien à l'Université Columbia, co-responsable de ce projet.

«Mais dans ce cas, c'est comme si quelqu'un avait injecté une couche très épaisse de glaçage à la base», ajoute-t-il.

«L'eau a toujours été connue pour être un élément important de la dynamique des couches de glace mais surtout comme un lubrifiant», poursuit le chercheur.

«Alors que les couches de glace changent, nous voulons pouvoir prédire l'ampleur de ces changements et tous nos modèles incluent de l'eau liquide sous la glace», précise-t-il.

Ces chercheurs ont calculé que l'eau qui a de nouveau gelé dans les profondeurs de l'Antarctique représentait jusqu'à 24% de la couche de glace autour du Dôme A, un haut-plateau de 4.206 mètres formant la plus grande élévation de la plaque glaciaire de l'Antarctique est.

Cette plaque a une superficie de 9,8 millions de km carré soit l'équivalent des Etats-Unis.

La calotte glaciaire arctique contient suffisamment d'eau fraîche pour faire monter le niveau des océans de 60 mètres, rappelle le scientifique.

Même si une petite partie de cette glace fondait et se déversait dans l'océan, plusieurs grandes villes côtières dans le monde comme Miami seraient submergées.

Ces travaux s'inscrivent dans le cadre d'une étude menée par six pays sur les montagnes invisibles Gamburtsev, un chaîne plus grande que les Alpes, «enterrées» sous plus de trois kilomètres de glace.

En 2006, les chercheurs auteurs de l'étude publiée jeudi ont découvert que des lacs d'eau liquide occupaient de vastes surfaces à certains endroits sous l'Antarctique.

En 2008-2009, ils ont organisé une expédition et à l'aide d'instruments de  géophysique ils ont pu créer des images en trois dimensions de la chaîne de montagnes Gamburtsev.

Ils ont pu en même temps obtenir des images détaillées des couches de glace recouvrant ces montagnes et des nappes d'eau sub-glaciales.