Environnement Canada a envoyé des milliers d'avertissements et des dizaines de milliers d'inspections pendant sept ans, de 2002 à 2009. Mais les dossiers des agents de l'autorité, des fonctionnaires censés faire respecter la législation environnementale, n'ont entraîné que 32 condamnations pendant cette période, soit moins de cinq par année.

Une ancienne dirigeante d'Environnement Canada de la section responsable de l'application des lois croit que l'agence devrait lancer beaucoup plus de poursuites.

«Il n'y aucune raison d'avoir une législation environnementale serrée au niveau fédéral si on ne l'applique pas, comme c'est le cas au Canada», a affirmé la députée néo-démocrate Linda Duncan, une avocate spécialisée en environnement qui a été à la tête du bureau en 1988.

«Se limiter à un rôle de surveillance, ce n'est pas assez.»

Le gouvernement conservateur avait promis de monter le ton face aux contrevenants en 2009, en faisant adopter des peines plus sévères. Les amendes augmentées prévues dans la nouvelle loi ne sont cependant pas encore entrées en vigueur.

Le personnel d'Environnement Canada doit surveiller les violations des lois canadiennes dans une multitude de domaines, des commerces de nettoyage à sec jusqu'au transport de marchandises vers l'Asie.

D'autres moyens de dissuasion

La directrice de la section d'Environnement Canada responsable de l'application des lois soutient que le nombre d'inspections et le peu de condamnations ne dépeignent pas la réalité parce que les condamnations ne constituent pas toujours l'objectif final.

Manon Bombardier affirme que les agents ont plusieurs outils à leur portée et qu'un avertissement écrit peut parfois être un moyen de dissuasion efficace.

«Les gens croient que l'application des lois environnementales se conclut par une poursuite, mais ce n'est pas nécessairement le cas pour nous, a indiqué Mme Bombardier. La poursuite judiciaire est un outil, mais ce n'est pas le seul qui est à notre disposition. Les nombres peuvent trompeurs.»

Selon Manon Bombardier, la gravité des violations et le poids du dossier du contrevenant influencent la voie que choisira de suivre Environnement Canada.

Mais les poursuites demeurent un outil important.

Deux déclarations de culpabilité récentes soulignent comment, grâce aux fonctionnaires de l'agence, deux entreprises ayant tenté de transporter illégalement des déchets électroniques toxiques hors du Canada ont été punies.

L'une des entreprises a reçu une amende de 10 000$ pour avoir exporté de vieux ordinateurs et des pièces électroniques vers la Chine, alors que l'autre devra remettre 30 000$ en pénalités pour l'envoi de 1200 batteries d'accumulateurs au plomb et de sept écrans à l'étranger.

De 35 000 inspections à 32 déclarations de culpabilité

Entre 2002-2003 et 2008-2009, les plus récentes statistiques disponibles sur le site Internet d'Environnement Canada, ses fonctionnaires ont effectué près de 35 000 inspections et ont envoyé quelque 9000 avertissements.

Pendant cette période, l'organisation a aussi lancé 288 enquêtes, entraînant seulement 32 déclarations de culpabilité sous la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Dans les dernières années, Environnement Canada a aussi investi plus de 40 millions $ pour améliorer ses capacités d'enquête et pour porter le nombre de ses agents à 320.

Selon Mme Duncan, le gouvernement doit mieux encadrer les industries polluantes, notamment dans le domaine des sables bitumineux.

«La mentalité qui s'est développée chez Environnement Canada est un retour aux années 1960, alors que l'organisation faisait copain-copain avec l'industrie, a condamné la députée d'Edmonton-Strathcona. Beaucoup d'entre nous ont travaillé très fort pour se débarrasser de cette mentalité et pour rappeler au gouvernement qu'il devait jouer son rôle de régulateur.»