Les scientifiques ont été surpris de la rapidité avec laquelle des bactéries ont digéré le méthane libéré dans le golfe du Mexique par l'explosion de la plateforme exploitée par BP, montrant selon eux le rôle clé joué par ces microbes pour contenir le réchauffement.

Les vastes quantités de méthane, un puissant gaz à effet de serre, qui se sont échappées ont été digérées par des bactéries en tout juste quatre mois, révèle une recherche publiée jeudi.

Le méthane représentait environ 20% du panache d'hydrocarbures produit par la fuite du puits accidenté situé à 1.500 mètres de fond entre le 20 avril, date de l'explosion de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon, et le 15 juillet, lorsque la fuite a été définitivement arrêtée. Cette catastrophe a été la pire marée noire dans l'histoire des États-Unis.

Le méthane «avait été complètement consommé par ces bactéries début septembre, ce qui a été plus rapide que ce à quoi nous nous attendions», explique à l'AFP David Valentine, professeur de géochimie à l'Université de Californie à Santa Barbara, un des principaux auteurs de ces travaux parus dans la revue américaine Science datée du 7 janvier.

La rapidité du processus de «digestion» du méthane par ces bactéries montre l'importance cruciale de ces micro-organismes pour empêcher que de grandes quantités de ce puissant gaz à effet de serre, s'échappant naturellement des fonds océaniques qui en regorgent, ne se retrouvent dans l'atmosphère.

«Ces bactéries agissent comme un filtre et ont une fonction importante, comme nous l'avons vu dans le cas de la marée noire de BP, car elles peuvent être très efficaces pour empêcher le méthane d'atteindre l'atmosphère», poursuit David Valentine.

Il note aussi qu'une autre de ses recherches, publiée au début de l'automne, montre que d'autres espèces de bactéries ont rapidement consommé l'éthane et le propane qui se trouvaient dans le panache d'hydrocarbures sortant du puits accidenté.

«Des bactéries ont également consommé une partie du pétrole déversé dans le golfe du Mexique mais on n'en a pas encore mesuré toute l'ampleur», relève le géochimiste, notant que l'usage abondant de dispersants a favorisé ce processus.

À la différence du pétrole, le méthane et les autres gaz naturels se dissolvent naturellement dans les eaux de l'océan avant d'être digérés par des bactéries.

«ll ne fait aucun doute que ces bactéries jouent un rôle déterminant dans la chimie des océans et contribuent à contenir le réchauffement planétaire», ajoute John Kessler, un océanographe à l'Université du Texas, autre co-auteur de l'étude.

«Le méthane est un gaz clé pour la chimie océanique et le climat», souligne-t-il dans un entretien avec l'AFP.

Une gigantesque émanation de ce gaz dans l'océan il y a environ 55 millions d'années aurait apparemment été la cause d'un important réchauffement et d'une disparition massive d'espèces documentées par des fossiles, relève ce chercheur.

La question qui reste posée est de savoir si une grande partie de ce gaz est alors allée directement dans l'atmosphère sans avoir eu le temps d'être consommée par des bactéries. Vu les énormes quantités, les bactéries ont aussi pu digérer ce méthane, produisant dans ce processus d'importants volumes de dioxyde de carbone (CO2) qui se serait échappé dans l'atmosphère, faisant grimper les températures.

En digérant le méthane, les bactéries produisent naturellement du CO2, explique l'océanographe.