Aux abords de l'autoroute de l'Énergie, à Bécancour, la première soirée d'information de l'industrie du gaz de schiste s'est déroulée dans une salle surchauffée où le porte-parole André Caillé a passé une partie de son temps à défendre son bilan à Hydro-Québec.

«C'est clair que ceux qui prennent la parole dans la salle ne sont pas pour», a laissé tomber M. Caillé, ex-PDG d'Hydro, qui préside l'Association pétrolière et gazière du Québec et est conseiller de la société Junex.

Ténors écologistes et citoyens se sont succédé aux micros. Dans la salle de 200 places, une bonne cinquantaine de personnes ont assisté à la soirée debout.

Plusieurs appels au moratoire ont été lancés, tous rejetés par M. Caillé.

«Si on veut que tous les permis soient achetés par les compagnies étrangères, c'est ce qu'il faut faire, un moratoire, parce que les actions de compagnies comme Junex vont chuter», a dit M. Caillé. «Si on fait ça, on va rester pauvres», a-t-il lancé plus tard.

Des citoyens inquiets

Plusieurs citoyens s'inquiétaient plutôt pour la chute de valeur de leurs maisons dans le voisinage de l'industrie gazière.

«La majorité des gens investissent toute leur vie pour avoir une maison, a dit une citoyenne qui s'est identifiée comme Anne-Marie. Et les maisons ne vaudront plus rien. Les fermes ne vaudront plus rien.»

«En Pennsylvanie, les banques et compagnies d'assurances ne donnent plus d'hypothèque et n'assurent plus les maisons», a dit une autre citoyenne.

«Si on doit vous subir, si par malheur vous tombez derrière chez moi, j'aimerais savoir que je suis dans vos préoccupations, parce que ça ne semble pas être le cas», a dit Danielle Rochette, de Bécancour.

«Je peux vous rassurer, a dit M. Caillé. Pensez-vous qu'on va faire exprès de s'installer si près des gens? On peut s'éloigner. Et de toute manière, le forage dure 30 à 60 jours, puis la fracturation dure 10 jours.»

M. Caillé a été pris à partie par André Breton, du groupe Maître chez nous 21e siècle, qui lui a reproché le projet du Suroît, celui de la centrale de TCE qui coûte 150 millions par année, des projets lancés sous le coup de l'urgence.

«Avec tout ce que vous nous avez dit qui s'est avéré faux, pourquoi on vous croirait?» a demandé M. Breton.

M. Caillé s'est défendu en rappelant que sous sa direction, les profits d'Hydro-Québec sont passés de 300 millions à 2,5 milliards par année.

La question des emplois a aussi été évoquée. Pierre-André Julien, docteur en économie et professeur à l'Université du Québec à Trois-Rivières, a remis en doute le sérieux de l'étude citée par l'industrie (mais non diffusée) et réalisée par la firme SECOR, étude qui prévoit la création de 5000 à 15 000 emplois.

«Je connais SECOR, j'ai travaillé avec eux, a dit M. Julien. Je sais comment on fait des rapports à SECOR, ça dépend qui les paye!»