L'appauvrissement de la biodiversité pourrait devenir une tendance irréversible si certains «points de basculement» sont franchis, s'alarme l'ONU dans un rapport publié lundi.

«Ce rapport nous dit que nous atteignons un point de basculement où des dégâts irréversibles pour la planète vont être faits si nous n'agissons pas de toute urgence», a averti le secrétaire exécutif de l'ONU sur la Diversité biologique, Ahmed Djoghlaf, lors de la présentation de la troisième édition des Perspectives mondiales de la biodiversité.

Le rapport a identifié trois «points de basculement»: «le dépérissement de vastes zones de forêt amazonienne», «la modification de nombreux lacs d'eau douce (...) vers l'eutrophisation (ndlr: augmentation des débris organiques entraînant une baisse de la quantité d'oxygène) et la domination des algues», ainsi que «l'effondrement de plusieurs écosystèmes de récifs coralliens».

M. Djoghlaf a regretté qu'aucun gouvernement n'ait complètement atteint l'objectif biodiversité de 2010, déclarée par l'ONU Année internationale de la biodiversité.

«Aucun des 21 objectifs secondaires qui accompagnent l'Objectif biodiversité de 2010 ne peut être confirmés comme ayant été atteints de façon définitive au niveau mondial», précise le rapport.

En conséquence, les «systèmes naturels qui sont le support de la vie, de l'économie et des moyens de subsistance sur la planète sont menacés de dégradation rapide et d'effondrement», relève le Programme de l'ONU pour l'environnement.

Cinq tendances engendrent la perte de biodiversité constatée par les chercheurs: «le changement de l'habitat, la surexploitation (des ressources), la pollution, les espèces exotiques envahissantes et les changements climatiques». Ainsi selon les experts, le taux d'extinction d'espèces animales et végétales est désormais «1 000 fois plus élevé que le taux historique connu jusqu'à ce jour».

«Pour s'attaquer aux causes profondes de la perte de biodiversité, nous devons lui donner une priorité plus élevée dans tous les domaines de prise de décision et dans tous les secteurs économiques», a demandé le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, cité dans le rapport.

L'ONU estime que les pays peuvent encore agir pour tenter de renverser la tendance, appelant les gouvernements à établir une «action urgente» pour réduire «la pollution terrestre et les pratiques de pêches destructrices qui affaiblissent les récifs coralliens».

«De nombreuses économies restent aveugles à la valeur immense de la diversité des animaux, des plantes et autres formes de vie et à leur rôle dans la santé et le fonctionnement des écosystèmes des forêts, des eaux douces ou des sols», a regretté le directeur exécutif du Programme de l'ONU pour l'environnement Achim Steiner, cité dans un communiqué.

«L'humanité a fabriqué l'illusion que nous pouvons en quelque sorte nous passer de la biodiversité (...): la vérité est que nous en avons besoin plus que jamais sur une planète de six milliards d'individus qui se dirige vers plus de neuf milliards d'individus», poursuit-il.

Le document met en avant de rares progrès comme «l'augmentation des zones protégées à la fois sur terre et dans les eaux côtières».