Les municipalités ont actuellement tous les instruments nécessaires pour protéger la biodiversité et les milieux naturels. Mais il leur manque des ressources. Pour cette raison, il est illusoire de penser qu'on pourra mieux protéger la nature sans augmenter les revenus des municipalités.

C'est ce qu'a expliqué Jean-François Girard, un avocat qui est président du Centre québécois du droit de l'environnement, hier au Sommet de la biodiversité qui avait lieu Centre Gelber dans Côte-des-Neiges. «Les municipalités n'ont peut-être pas les moyens de leurs ambitions, a dit Me Girard. Il faut revoir comment elles peuvent avoir des ressources. On promet souvent qu'on n'augmentera pas les taxes. C'est une illusion. On ne peut pas avoir un meilleur panier de services sans ça. On veut le beurre et l'argent du beurre.»

 

Les municipalités ont une panoplie souvent sous-utilisée pour la protection des milieux humides et forestiers, selon Me Girard. «La jurisprudence est claire, la réglementation environnementale n'est pas une expropriation déguisée. Le zonage peut avoir pour effet de confisquer une partie de la valeur économique de la propriété, mais c'est accepté.»

Cela s'applique non seulement aux industries et aux résidences, mais aussi aux agriculteurs. «Il y a aussi une légende juridique voulant que les municipalités n'aient aucun pouvoir dans les zones agricoles, dit Me Girard. C'est faux. Par exemple, la MRC de Haute-Yamaska a imposé une bande riveraine de 10 mètres.»

Ryan Young, conseiller municipal de Sainte-Anne-de-Bellevue, est un bon exemple de cette réalité. «Je suis un militant et je suis devenu conseiller pour protéger des milieux naturels», a indiqué M. Young. Certains terrains qu'il veut protéger sont la propriété de la Société générale de financement. «C'est quand même étrange que le gouvernement du Québec attende qu'un militant se fasse élire au conseil municipal pour protéger les milieux naturels.»

La Ville de Boucherville a pour sa part acquis plusieurs terrains naturels pour les protéger. «Les relations humaines sont très importantes», a expliqué Pierre Pion, directeur du développement urbain à Boucherville. «Par exemple, nous avons obtenu un prix de 5 cents le pied carré pour un terrain parce que j'avais aidé le propriétaire dans un autre dossier.» Dans le cas de l'arboretum Stephen-Langevin, acquis en 2009, il a fallu attendre le décès de la propriétaire, qui s'opposait à la vente du terrain, et négocier avec la succession.

Plusieurs approches

Le Sommet sur la biodiversité a invité quatre conférenciers internationaux pour présenter d'autres approches. À Rotterdam, le Centre de recherche en écologie urbaine a travaillé avec le port pour déplacer une population de 100 crapauds d'une espèce menacée dans une série d'étangs artificiels construits à 10 kilomètres du site d'un agrandissement prévu du port. Le coût a été de 133000$, plus entre 4000et 5000$ par année pour le suivi de la population, pour un projet de plus de 1,3 milliard qui n'aura mis qu'une dizaine d'années à se concrétiser - l'ouverture de la nouvelle section du port est prévue en 2013.

«D'autres groupes nous ont reproché d'accepter la compensation», a expliqué Niels de Zwarte, du Centre de Rotterdam, en entrevue avec La Presse. «Mais de notre point de vue, il valait mieux convaincre dès le départ le Port de travailler avec nous. Les enjeux économiques étaient trop grands, le permis de construire aurait fini par être délivré.»

À Chicago, c'est justement la décroissance économique du quartier Calumet, au sud de la ville, qui a permis la préservation de 1500 hectares de milieux naturels. «Le quartier a été durement touché par les fermetures d'aciéries», nous a expliqué Aaron Durnbaugh, du département de l'environnement de la Ville de Chicago. «Il y a eu des projets d'aéroports et de nouveaux lieux d'enfouissement dans les années 90 qui ont mobilisé le mouvement environnemental. Ils ne se sont pas concrétisés, notamment pour des raisons économiques. Nous avons pris la décision de protéger les milieux naturels qui existaient dans les propriétés industrielles. Les aciéries avaient acheté beaucoup de terrains sans les développer en prévision d'une croissance qui ne s'est pas matérialisée.»

Aujourd'hui, le quartier compte seulement 400 hectares de zonage industriel. En 10 ans, la superficie des milieux naturels ouverts au public est passée de 600 à 900 hectares, au gré des acquisitions et des aménagements, et M. Durnbaugh estime que d'ici 15 ans, le public aura accès à la totalité des 1500 hectares de milieux naturels du secteur.

 

La nature à Montréal

> 65km2 d'espaces verts

> 133 km de rives accessibles

> 24 grands parcs totalisant 2470 hectares

> 1,5 million d'arbres publics

> 2212 hectares de bois

>1906 hectares de friches et champs

> 697 hectares de milieux humides

> En 2004, 3,2% du territoire était protégé comme milieu naturel

> En 2010, 5,2% (2634 hectares) du territoire est protégé comme milieu naturel (gain de 2% pour un coût de 30 millions)

> Cible de 6% de territoire protégé

SOURCE: Direction des grands parcs et de la nature en ville.

NOTE: Pour toute l'île de Montréal

 

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Comment verdir le béton

> Plantation d'arbres ou d'arbustes dans des endroits asphaltés ou gazonnés non utilisés, comme les marges ou les terre-pleins (exemple: stationnement des Galeries d'Anjou)

> Verdissement des murs avec des plantes grimpantes

> Utilisation de matériaux réfléchissants sur les toits, les murs et les surfaces asphaltées (par exemple, des enduits asphaltés pâles)

> Respect des distances pour les arbres (par exemple, ne pas planter à moins de 4 m d'un lampadaire)

SOURCE: CRE-Montréal www.cremtl.qc.ca/SBM (lien fonctionnel à partir de demain)

NOTE: Conseils pour les propriétaires institutionnels, commerciaux et industriels