La «police verte» sera mieux armée pour sévir contre les pollueurs. Le gouvernement Charest déposera au cours des prochains jours un projet de loi pour augmenter les amendes, qui n'ont pas changé depuis 20 ans. Et il donnerait le pouvoir à ses inspecteurs d'infliger eux-mêmes des sanctions.

À l'heure actuelle, seul un juge peut imposer une amende à une entreprise ou une personne qui commet une infraction à la Loi sur la qualité de l'environnement. Il n'existe en effet que des sanctions pénales dans la législation québécoise.

 

Lorsqu'un inspecteur du Centre de contrôle environnemental constate une infraction, un enquêteur doit ensuite établir une preuve hors de tout doute raisonnable que la loi a été violée. Le dossier est remis au Directeur des poursuites criminelles et pénales du ministère de la Justice, qui remet un constat d'infraction si la preuve est jugée suffisante. Le présumé contrevenant peut plaider coupable ou contester l'accusation devant la Cour du Québec.

Au moins deux ans s'écoulent entre le moment où une infraction est constatée et la condamnation du contrevenant.

Avec son projet de loi, la ministre de l'Environnement, Line Beauchamp, permettrait aux inspecteurs de donner des «sanctions administratives» aux délinquants, sans avoir à passer devant les tribunaux, ont confirmé diverses sources. Elle avait manifesté ses intentions en février dernier, soulignant que le système actuel est complexe et coûteux. «On s'en va vers ça», s'est contenté de dire son attaché de presse, Dave Leclerc.

Comme en Ontario

L'Ontario a adopté une loi semblable en 2005. Queen's Park a conservé le régime des sanctions pénales, mais il a donné le pouvoir à ses inspecteurs de donner des «pénalités environnementales» lorsqu'ils constatent une infraction. Ces pénalités peuvent atteindre jusqu'à 100 000$ pour chaque jour durant lequel l'infraction s'est poursuivie. Une entreprise peut contester la pénalité devant le Tribunal de l'environnement, mais le fardeau de la preuve lui incombe.

Au ministère québécois de l'Agriculture, les inspecteurs ont le pouvoir d'infliger des sanctions administratives depuis 1997. Les amendes peuvent être données pour des infractions flagrantes, «que l'on peut constater de visu facilement» comme la malpropreté dans un restaurant, a expliqué un porte-parole, Clément Falardeau. Les entreprises peuvent toujours contester la sanction devant les tribunaux.

L'initiative du gouvernement Charest pourrait satisfaire les groupes environnementaux, dont certains ont eu vent de ses intentions. Ils militent depuis des années pour des changements dans l'imposition des amendes.

Une «police» peu payante

La «police verte» rapporte peu de revenus à l'État pour le moment. En 2008-2009, les amendes ont totalisé 612 000$ seulement, cinq fois moins qu'en Ontario. Elles ont parfois atteint le million au cours des dernières années. Le gouvernement Charest prévoyait pourtant en 2004 que les amendes allaient rapporter de 5 à 10 millions dans un avenir rapproché.

Les amendes prévues à la Loi sur la qualité de l'environnement n'ont pas changé depuis la fin des années 80, a confirmé le Ministère. Une entreprise accusée d'avoir rejeté un contaminant dans l'environnement est passible d'une amende de 1800$ à 120 000$ au maximum, par exemple. Le projet de loi de Line Beauchamp prévoira des amendes plus salées. Environ 280 inspecteurs et une vingtaine d'enquêteurs travaillent au ministère de l'Environnement.