L'opposition grandissait mercredi contre la proposition d'interdire le commerce international du thon rouge d'Atlantique, certains pays de la Ligue arabe s'étant rangés du côté du Japon lors de la réunion de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), qui s'est ouverte samedi à Doha, au Qatar.

La Ligue arabe estime que cette interdiction pourrait heurter les pays halieutiques pauvres et qu'elle n'est fondée sur aucun avis scientifique. Cette position conforte le Japon, qui a par ailleurs affirmé avoir reçu le soutien de la Chine, alors que d'autres pays sont encore indécis.

«La plupart des pays méditerranéens ont peur parce qu'ils exportent ce thon», a déclaré Ahmed Said Shukaili, un délégué du Sultanat d'Oman, dont le pays entend suivre la position de la Ligue arabe. «Il y a beaucoup d'inquiétudes pour les pêcheurs qui vivent de ce poisson», a-t-il ajouté, parlant d'une «question économique».

D'autres pays comme l'Australie et le Pérou ont exprimé leur soutien pour une proposition allégée qui sera présentée à la CITES ce jeudi. Elle prône une régulation du commerce international du thon rouge qui serait confiée, pour la première fois, à la CITES, plutôt qu'une interdiction catégorique.

Le Japon, qui importe 80% de la pêche, a argué mercredi que la CITES n'avait aucun rôle à jouer dans la régulation du thon rouge ou d'autres espèces maritimes. Il s'est dit prêt à accepter des quotas annuels de prises fixés par la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (ICCAT).

La CITES est «injuste et partiale», a déclaré à l'Associated Press Masanori Miyahara, conseiller en chef de l'Agence des pêcheries du Japon, notant que l'interdiction permettra aux Européens et aux Américains de poursuivre la pêche de thon rouge dans leurs eaux domestiques. «Si nécessaire, arrêtons de pêcher en respectant les dispositions de l'ICCAT. Alors, tout le monde devra renoncer à la pêche», a-t-il suggéré.

L'ICCAT, qui régule actuellement le commerce du thon rouge, est accusée par certains de ne pas tenir compte de l'avis de ses experts en définissant ses quotas et de ne pas faire assez pour empêcher le dépassement de quotas déjà élevés ou une pêche illégale très répandue.

La principauté de Monaco, à l'origine de la proposition d'interdiction du commerce international du thon rouge, argue que leur nombre a chuté de 75% depuis 1957 et ce, de façon drastique au cours des dix dernières années, à cause de la surpêche et de la demande croissante des amateurs de sushis.

Elle est notamment soutenue par l'Union européenne et les États-Unis, qui jugent l'interdiction nécessaire pour protéger cette espèce menacée, migrant entre les eaux de l'ouest de l'Atlantique et la Méditerranée.

«Les pays d'Afrique du Nord craignent que les pêcheurs ne perdent leur emploi. Mais, de toute manière, les emplois seront détruits quand il n'y aura plus de thon rouge», a déclaré Patrick Van Klaveren, membre de la délégation monégasque. «Avec le thon rouge, ce n'est pas une question de 10 ou 20 ans, mais de cinq ou six ans voire moins avant de voir les stocks s'effondrer», a-t-il prédit.

Les 175 pays signataires de la Convention doivent s'entretenir du 13 au 25 mars de nouvelles propositions en matière de réglementation du commerce d'un certain nombre d'espèces animales et végétales. L'adoption d'une interdiction du commerce international du thon rouge de l'Atlantique requiert les deux tiers des voix.