Le Canada a officiellement avisé l'Organisation des Nations unies qu'il réduira, d'ici dix ans, ses émissions de gaz carbonique par 17 pour cent selon les niveaux de 2005, et ce conformément à l'Accord de Copenhague sur les changements climatiques.

C'est ce qu'a annoncé le ministre fédéral de l'Environnement, Jim Prentice, samedi. Au passage, M. Prentice a précisé que ces cibles sont identiques à celles préconisées par les Etats-Unis, ce à quoi tenait le gouvernement canadien.

«Tout au long du processus, nous avons manifesté notre intention de respecter le dénouement de la Conférence de Copenhague et d'aligner nos politiques en matière d'énergie propre et de changements climatiques avec celles de l'administration Obama», a affirmé M. Prentice.

Mais la nouvelle a fortement déplu aux dirigeants de Greenpeace, selon qui la nouvelle cible mènera à une hausse des émissions de gaz à effet de serre. En fait, selon Greenpeace, la nouvelle cible correspond à une augmentation de 2,5 pour cent des émissions, d'ici 2020, au-dessus du niveau de 1990.

Dans un communiqué de presse émis en début de soirée samedi, Greenpeace exige une réduction de 25 à 40 pour cent des gaz à effet de serre sous le niveau de 1990, et ce d'ici 2020, pour les pays industrialisés, dont le Canada.

Greenpeace doute également que le gouvernement Harper respecte ses propres cibles.

«Ce dernier renie les obligations du Canada dans le cadre du Protocole de Kyoto et laisse les émissions de gaz à effet de serre canadiennes augmenter alors qu'il s'est engagé à les réduire», soutiennent les responsables de Greenpeace.

David McGuinty, député fédéral d'Ottawa-Sud et porte-parole libéral en matière d'environnement et d'énergie, a également manifesté sa déception à la suite de l'annonce.

«Au Canada, nous n'avons toujours pas de plan pour les changements climatiques, a déclaré M. McGuinty en entrevue à La Presse Canadienne, samedi. Il n'y a pas vraiment d'annonce ici. Depuis presque quatre ans, trois ministres de l'Environnement nous disent la même chose.»

M. McGuinty s'est par ailleurs dit inquiet de voir le Canada aligner sa politique environnementale avec celle du gouvernement américain.

«Le grand problème maintenant est que le Canada est très vulnérable à ce qui se passe aux Etats-Unis. Si M. Obama a du succès avec son plan, ce sera bon pour les Etats-Unis. Le plan américain, qui compte plus de 1400 pages et qui est très détaillé, a été développé pour les Etats-Unis et non pour le Canada», a-t-il ajouté.

Les pays devaient soumettre leurs cibles de réduction d'émissions de gaz carbonique au plus tard le 31 janvier, tel que leur avait demandé l'ONU.

L'entente intervenue à Copenhague prévoit que les pays en développement recevront un soutien financier pour les aider à combattre le réchauffement climatique, sans toutefois imposer de nouvelles cibles de réduction des gaz à effet de serre. Les pays pourront fixer leurs propres cibles, sans contraintes.

Selon les responsables de groupes écologiques, il s'agit d'une entente «décevante», car elle n'est pas «juridiquement contraignante».

Bien que l'objectif de 17 pour cent ne sera pas facile à atteindre, M. Prentice croit qu'il est réalisable. Mais il n'a pas précisé quels gestes seront posés pour y arriver.

«Eventuellement, nous nous pencherons sur les sables bitumineux et sur les différentes sources d'émissions. Mais aujourd'hui, notre objectif était de nous acquitter de nos obligations relativement à l'accord», a fait remarquer M. Prentice.

«Nous savons qu'il nous est possible d'atteindre notre objectif, nous sommes prêts à le respecter et les autres pays devront faire de même», a renchéri le ministre de l'Environnement.

M. Prentice a rappelé que d'autres négociations devaient être menées à terme, d'ici la prochaine année, afin d'en arriver à un accord contraignant avec tous les émetteurs de gaz carbonique, incluant la Chine et les Etats-Unis.

Mais il a avisé que le processus pourrait prendre du temps à aboutir, faisant remarquer qu'il avait fallu plusieurs années pour transposer le Procole de Kyoto en traités contraignants.

M. Prentice a noté que des pays tels la Chine, le Brésil, l'Inde et les Etats-Unis, dans le cadre du Protocole de Kyoto, n'étaient pas forcés de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

M. Prentice souhaite que la situation soit différente cette fois-ci, et que les pays n'ayant toujours pas annoncé leurs cibles le fassent très prochainement.

M. Prentice n'a pas voulu spéculer sur le sort qui sera réservé aux pays qui n'auront pas respecté l'échéancier du 31 janvier.

«Nous verrons ce qui arrivera. Les Etats-Unis ont dévoilé leurs cibles hier (vendredi) et nous avons annoncé les nôtres aujourd'hui (samedi).»