Le Québec et l'Ontario craignent que leurs importantes réductions d'émissions de gaz à effet de serre donnent un passe-droit à l'Alberta, qui pourra en profiter pour augmenter substantiellement les siennes, et ce, avec la complicité d'Ottawa.

Transportant leur colère à Copenhague, en marge de la conférence sur le climat, les gouvernements Charest et McGuinty ont exhorté le fédéral à lutter avec plus de vigueur contre les changements climatiques, hier, lui enjoignant de revoir à la hausse son objectif de réduction des émissions à l'horizon 2020.

 

Le cas contraire, tous les efforts des deux plus importantes provinces au pays seront annulés par le laxisme de certaines autres, nommément l'Alberta et la Saskatchewan, ont-ils fait valoir.

«L'ambition des uns ne peut être un laissez-passer pour les autres, a lancé la ministre québécoise de l'Environnement, Line Beauchamp. Le Canada doit et peut avoir une cible plus ambitieuse.»

Si la ministre Beauchamp s'est gardée d'attaquer directement le gouvernement Harper, se contentant de l'inciter à en faire plus, son homologue ontarien, John Gerretsen, est allé plus loin en reconnaissant que la position de son pays était «une source d'embarras» à l'occasion des rencontres internationales.

«Comme Canadiens, c'est sûr que chaque prix fossile (ce prix remis quotidiennement par les écologistes internationaux au pays ayant le plus nui aux négociations) est une source d'embarras», a-t-il lâché.

Injustice

La conférence de presse organisée en soirée, hier, avait pour objectif de souligner la «grande collaboration» du Québec et de l'Ontario dans la lutte contre les changements climatiques, ainsi que leurs cibles respectives de 20% et 15% de réduction de leurs émissions. Mais il n'a fallu qu'une question des journalistes pour réveiller la colère des ministres contre Ottawa, qui ne propose qu'une réduction de 3% des émissions sous leur niveau de 1990 (20% sous leur niveau de 2006).

D'abord, parce que les deux provinces considèrent que la timide cible du fédéral à l'horizon 2020 permet aux provinces pétrolières d'accroître leurs émissions au cours des prochaines décennies. Ensuite, car Ottawa entend réduire les émissions par rapport à leur niveau de 2006, plutôt que celui de 1990, comme le reste de la communauté internationale.

Cela est vu comme une injustice, particulièrement pour le Québec, car on laisse ainsi entendre que les réductions faites par les industries avant 2006 ne comptent pas et ne seront donc pas prises en compte dans une future Bourse du carbone.

«Nous pensons tous les deux qu'il est important que le gouvernement fédéral reconnaisse les efforts faits avant 2006», a indiqué Mme Beauchamp.