Lors de sa création en 2006, Écolosol a pu en toute légalité obtenir son permis du ministère de l'Environnement sans se soumettre au processus d'audiences publiques, parce que la société ne demandait pas d'enfouir les sols les plus contaminés.

«À l'époque, on avait fait une étude de marché basée sur des sols de critère C et moins, mais par la suite on s'est rendu compte qu'on devait refuser des chargements qui dépassaient le critère C, explique Marie-Julie Archambault, directrice d'Écolosol. C'est pourquoi on demande un changement à notre certificat d'autorisation.»

 

C'est ce changement proposé vers des sols plus contaminés qui est devant le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE).

Écolosol appartient à Normand Trudel, homme d'affaires proche du maire de Mascouche et important donateur du Parti libéral et du Parti québécois, et de Tony Accurso, dont certaines entreprises ont fait l'objet de perquisitions mardi dans une affaire de fraude fiscale.

Hier, M. Trudel a réaffirmé son partenariat avec M. Accurso. «Ça ne change rien à nos affaires, c'est un partenaire, c'est tout», a dit M. Trudel à La Presse.

De son côté, Serge Hamelin, candidat à la mairie de Mascouche, affirme que le changement de zonage municipal qui avait ouvert la porte à Écolosol était passé inaperçu, en 2006. «On avait deux candidats de notre parti qui siégeaient au conseil municipal de Mascouche, mais on ne l'a pas vu passer», dit-il.

Le maire de Mascouche, Richard Marcotte, rétorque que le changement découlait des orientations annoncées en 2002 dans le schéma d'aménagement de la MRC. «Ça fait plusieurs années qu'on travaillait là-dessus», dit M. Marcotte.

Selon la Ville, le schéma de 2002 autorisait «les sites d'entreposage et de valorisation des résidus dangereux ou les industries lourdes». Le 28 février 2006, la Ville de Mascouche a distribué un document qui proposait de favoriser sur les terrains achetés par Écolosol «le traitement et ou la valorisation» de «déchets dangereux». Le zonage a été modifié le 20 mars suivant.

M. Marcotte reconnaît ses liens avec M. Trudel. «Je le connais depuis 1983», dit-il. M. Trudel est administrateur de la Fondation Richard Marcotte, qui donne des bourses aux jeunes artistes et sportifs. Mais le maire nie toute ingérence de M. Trudel dans les décisions de la Ville. «Les changements de zonage ont été faits en tout respect des normes», dit-il.

Séance d'information

Mardi soir, Écolosol présentait son projet au cours d'une séance d'information du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE). L'entreprise affirme que les risques de contamination sont infinitésimaux. La cellule d'enfouissement d'Écolosol comprend deux membranes étanches superposées, avec chacune leur réseau de conduites pour évacuer et traiter l'eau. Le tout repose sur une couche d'argile naturelle de 4 mètres. Des filtres traitent l'eau extraite de la cellule avant de la rejeter dans la rivière Mascouche.

Autorisée pour 668 000 mètres cubes, en 2006, la cellule d'Écolosol a déjà accueilli environ 170 000 mètres cubes de sols contaminés au critère C ou moins. Il reste donc une capacité de 500 000 mètres cubes.

Si elle obtient son certificat d'autorisation, Écolosol pourra soumissionner pour traiter 150 000 mètres cubes de sols contaminés au-delà du critère C qui se trouvent déjà sur ses terrains, mais qui sont sous la responsabilité du ministère de l'Environnement. Il s'agit de sols contaminés par des résidus de raffineries dans les années 60 et 70.

À la suite de la séance d'information de mardi, tout citoyen peut demander une audience publique, ce que M. Hamelin a l'intention de faire. Une fois la consultation publique terminée, le BAPE doit remettre son rapport à la ministre Line Beauchamp. Elle peut ensuite accorder le certificat d'autorisation.