L'agent Jean-Loup Lapointe a «préféré être téméraire plutôt que prudent» lors de l'intervention policière qui a mal tourné le 9 août 2008, écrit le second expert en emploi de la force appelé à témoigner à l'enquête du coroner sur la mort de Fredy Villanueva.

La théorie selon laquelle l'agent Jean-Loup Lapointe a tiré quatre balles parce qu'il ne pouvait pas arrêter la séquence de tir n'est pas crédible, estime François Van Houtte, policier à la Gendarmerie royale du Canada pendant 25 ans aujourd'hui à la retraite. Son rapport de 84 pages a été déposé, lundi, au palais de justice de Montréal.

François Van Houtte contredit ainsi la théorie du premier expert en emploi de la force, Bruno Poulin, qui a témoigné plus tôt à l'enquête du coroner André Perreault. M. Poulin, enseignant à l'École nationale de police, estimait que l'agent Lapointe «pourrait ne pas avoir été en mesure d'arrêter les tirs, même dans le cas où une potentielle menace se serait éliminée pendant cette courte période».

«Non pertinente», «sans avenue» et «utopique». L'ancien tireur d'élite ne manque pas de qualificatifs pour décrire ce qu'il pense de la théorie de Bruno Poulin. M. Van Houtte affirme que l'agent Lapointe a pris «consciemment» la décision de tirer et le moment d'arrêter de tirer. Rappelons que Jeffrey Sagor Metellus a été atteint de la quatrième balle tirée par le policier, alors que le jeune homme était à au moins six pieds de distance de l'agent.

Ce second expert en emploi de la force va même plus loin: «Dès le début de l'intervention policière et tout au long de celle-ci, les policiers n'ont vraisemblablement pas respecté la norme de prudence raisonnable concernant: la nature de l'infraction alléguée, la connaissance du caractère dangereux de certains individus (gang de rue des Bloods) et l'évaluation de la situation. À preuve, la tournure violente des événements avec Dany Villanueva.»

L'expert en emploi de la force questionne «la démesure des prises de décision tout au long de l'intervention et en particulier celle de faire feu, compte tenu de la banalité et de l'insignifiance de l'infraction alléguée à l'origine de ce drame, en l'occurrence un jeu de dés, et qui s'est soldé par la mort d'un jeune homme de 18 ans tout en blessant gravement deux autres personnes».

L'agent Lapointe n'avait pas épuisé les autres options disponibles pour maîtriser la situation comme se désengager partiellement, l'utilisation appropriée de ses armes intermédiaires et la communication appropriée avec son partenaire, selon l'expert Van Houtte. Il a mis à risque sa partenaire, l'agente Stéphanie Pilotte, ajoute-t-il.

La semaine dernière, les avocats du Service de police de la Ville de Montréal et de la Fraternité des policiers ont tenté pendant deux jours et demi de miner la crédibilité du policier à la retraite embauché par le camp Villanueva. Or, ils ont échoué. Mercredi dernier, le coroner Perreault a qualifié Van Houtte de témoin expert en emploi de la force et en usage d'armes à feu. Le policier à la retraite poursuit son témoignage aujourd'hui à l'enquête du coroner.