Anthony Clavasquin ne connaissait pas personnellement l'agent Jean-Loup Lapointe avant les événements tragiques du 9 août 2008, mais des amis lui avaient dit que ce n'était «pas un bon policier» parce qu'il «arrêtait quiconque pour n'importe quelle raison». Fredy Villanueva, lui, jouissait d'une bonne réputation.

«C'était un bon petit gars qui ne lâchait jamais prise», a raconté Clavasquin, hier, interrogé pour la quatrième journée dans le cadre de l'enquête du coroner sur la mort de Fredy Villanueva. Le garçon a été abattu par l'agent Lapointe lors d'une échauffourée dans un stationnement de Montréal-Nord. Le policier a aussi blessé deux autres jeunes hommes avec son arme de service. Clavasquin, qui se trouvait avec le groupe qui jouait aux dés et qui a été interpellé par l'agent Lapointe et sa coéquipière, n'a pas été blessé. «Il avait fini de tirer quand il m'a pointé. J'ai levé les mains», a expliqué Clavasquin, hier, pour la énième fois.

 

Répétitions et redites

Le témoin n'en était pas à une répétition près. Avec une bonne douzaine d'avocats, sans compter les représentants de parties intéressées, les mêmes questions reviennent inlassablement, souvent pareilles, ou à peine modifiées. Chaque intervenant s'emploie toutefois à faire ressortir sa théorie pendant l'exercice. Hier, Alexandre Popovic, de la Coalition contre la répression et la brutalité policière, a orienté ses questions contre les agissements policiers. On a ainsi appris qu'il caresse l'idée de voir des policiers sans arme, ce qui éviterait la perte de vies humaines, croit-il.

François Bérard, du mouvement Solidarité Montréal-Nord, a pour sa part versé dans l'étude sociologique. «Y a-t-il beaucoup de gens qui restent dans le quartier nord-est de Montréal-Nord? Comment se sentent les Latino-Américains à Montréal-Nord? Quel est le sentiment des gens basanés? Est-ce qu'ils se sentent différents d'avoir le teint foncé? Et les Noirs, comment sont-ils perçus? Et les jeunes Noirs, comment sont-ils perçus? Est-ce que beaucoup de gens se retrouvent à l'extérieur de la maison pendant l'été?»

«Oui, comme mon petit frère de 2 ans, il joue en arrière de la cour», a répondu Clavasquin, un peu interloqué. Bérard a alors suggéré à Clavasquin que les gens du quartier, en majorité des immigrés, jouent aux dés et aux dominos comme c'est la coutume dans les Caraïbes.

L'enquête présidée par le coroner André Perreault, qui se déroule par à-coups depuis l'automne dernier, se poursuit la semaine prochaine.