Aucun changement au classement depuis samedi. Loïck Peyron mène la course depuis douze jours, cap au sud, bâbord amures dans une allure de près (vent pratiquement de face entrant du côté gauche). Les premiers enchaînent des journées semblables. Ce n'est pourtant pas le moment de relâcher la pédale!

Bien que la tête de la flotte soit sous le même régime de vents et de météo, Peyron (Gitana 80) engrange les miles sur ses poursuivants à raison de 3 ou 4 par jour. C'est peu, me direz-vous, mais dans une navigation au près où tous profitent de conditions similaires sur un bateau à priori moins efficace que d'autres - conçus spécifiquement pour gagner l'épreuve - le vieux loup de mer use de ses connaissances en matière de réglages d'une main de maître et fait la barbe au reste du groupe de meneurs.

Rappelons-nous que les bateaux conçus pour le Vendée Globe le sont en fonction de vents au portant (vents pratiquement plein arrière) puisque la majeure partie du trajet se fait sous cette allure et qu'au près dans une mer hachée, tous devraient aller à la même vitesse, ce qui n'est pas peu dire sur les talents du skipper de Gitana 80.

C'est donc à la file indienne et de manière très peu décalée les uns des autres que les meneurs descendent l'Atlantique sud à mi-chemin entre l'Afrique et l'Amérique du Sud.

Tous attendent la porte météo leur permettant de jouer une carte et de couper vers le sud-est devant Peyron. Mais pour l'instant, c'est la guerre des nerfs. Le choix de garder le maximum de vent et d'aller plein sud s'impose de lui-même et chacun doit naviguer au mieux de ses connaissances dans ce classement hyper serré qui n'offre pas de possibilité de dépassement à ce moment de la course.

Le moral et le sommeil des skippers s'en trouvent affectés et la moindre erreur peut coûter très cher. Le moins qu'on puisse dire c'est que ceux-ci avaient la discussion plutôt courte à la radio satellite ce matin.

Maintenant, ajoutez à ça le bateau qui tape (pour ne pas dire qui cogne fort) dans les vagues de face à longueur de journée et vous avez une idée de l'ambiance à bord...

Beyou casse

Jérémie Beyou (Delta Dore) qui faisait une superbe course depuis le départ et qui s'affichait constamment dans les dix premiers doit faire route vers le Brésil afin de réparer deux barres de flèche sur son mat (pièces du mât qui servent à écarter les haubans qui, eux, sont les cordages qui maintiennent le mât en place). Elles ont cassé sans trop savoir pourquoi. Il cherchera donc une baie à l'abri sur la côte brésilienne afin de tenter une réparation et de repartir. Il est important de se souvenir qu'aucune assistance n'est permise dans ce cas et que le matériel de réparation doit déjà être embarqué sur le voilier...

Anticyclone 101

Qui dit anticyclone, dit haute pression donc beau temps. Qui dit beau temps dit peu de vent. Qui dit dépression dit mauvais temps donc du vent. Qui dit mauvais temps en mer dit danger.

Les skippers cherchent en conséquence à passer entre les deux phénomènes météo en rasant les dépressions afin de profiter du vent qu'elles offrent tout en pariant de ne pas s'engouffrer à l'intérieur même et vivre la tempête.

Voilà donc le grand défi des prochains jours : l'anticyclone de Sainte-Hélène.

Immense, il s'étend pratiquement de l'équateur entre l'Amérique du Sud et l'Afrique et descend aussi bas que la pointe ouest de l'Afrique.

Soit on le contourne et on profite de bons vents et le parcours se voit rallongé (ce qui est le cas actuellement), soit on coupe le fromage en deux et vous voilà dans un pari très audacieux qui, au risque de manquer de vent, raccourcira le trajet de manière imposante.

Pour ceux qui se souviennent du Vendée Globe 2004, Jean Le Cam (VM matériaux) et Vincent Riou (PRB) avaient pris le pari de couper l'anticyclone en deux à la suite de l'apparition d'une petite dépression qui avait traversé la zone de beau temps.

Finalement, cette stratégie avait joué en leur faveur puisqu'ils avaient alors pris plus de 500 miles nautiques d'avance sur leurs plus proches poursuivants. Ils n'ont plus jamais été inquiétés par la suite, et ce, pour le reste de leur tour du monde.

Est-ce qu'un skipper prendra le risque à son tour de couper la tarte ? J'en doute mais ça reste à voir.

Les positions + retard sur le 1er (miles nautiques)

1- Loïc Peyron-FRA (Gitana Eighty)

2- Sébastien Josse -FRA (BT), 21.8

3- Jean-Pierre Dick-FRA (Paprec-Virbac), 36.2

4- Vincent Riou-FRA (PRB), 51.4

5- Armel Le Cléac'h-FRA (Brit Air), 53.1

6- Mike Golding-GB (Ecover), 64.8

7- Yann Eliès-FRA (Generali), 70.8

8- Jean Le Cam-FRA (VM Matériaux), 85.6

9- Roland Jourdain-FRA (Veolia Environnement) , 90.1

10- Marc Guillemot-FRA (Safran), 225.3

11- Brian Thompson-GB (Team Pindar), 232.2

12- Dominique Wavre-SUI (Temenos), 236.4

13- Samantha Davies-GB (Roxy), 290.9

14- Jérémie Beyou-FRA (Delta Dore), 421.6

15- Michel Desjoyeaux-FRA (Foncia), 421.8

16- Dee Caffari-GB (Aviva), 484.0

17- Arnaud Boissières-FR (Akena Verandas), 522.4

18- Una Basurko-ESP (Pakea Bizkaia), 605.4

19- Steve White-GB (Toe in Water), 648.1

20- Jonny Malbon-GB (Artemis), 693.0

21- Rich Wilson-USA (Great American), 734.6

22- Raphaël Dinelli-FRA (Océan Vital), 740.1

23- Bernard Stamm-SUI (Cheminée Poujoulat), 943.6

23- Norbert Sedlacek-AUT (Nauticsport), 1101.0

25- Derek Hatfield-CAN (Spirit of Canada), 1474.9

26- Jean-Baptiste Dejeantly-FRA (Maisonneuve), 1573.0

27- Alex Thompson-GB (Hugo Boss), Abandon

28- Kito de Pavent-FRA (Groupe Bel), idem

29- Marc Thiercelin-FRA (DCNS), idem

30- Yannick Bestaven-FRA (Aquarelle.com), idem