Il est 7h15 et Guillaume Tremblay est pratiquement prêt à partir à son local électoral pour y participer à une conférence téléphonique avec Pauline Marois, chef péquiste, et les 123 autres candidats.

Il fait un temps frais mais radieux, sa copine Johannie dort encore et il n'est pas question de petit-déjeuner avant de partir. Dans l'appartement du candidat du Parti québécois dans Masson que j'accompagne en campagne depuis la veille, dans son sous-sol d'un bungalow de Mascouche que je viens de squatter le temps d'un reportage, il n'y a rien à manger. Le frigo est littéralement vide. Un porte-vêtements où sont suspendues des tonnes de chemises et de vestons prend plutôt la moitié de l'espace de la cuisine.

 

Dans la salle de bain, deux magnifiques appareils électroménagers à chargement frontal rappellent son passé tout récent de gérant d'un magasin Corbeil. Sur la table de la salle à manger traînent de la paperasse et de nombreuses cravates.

C'est un samedi matin et le jeune homme de 24 ans est justement en train d'ajuster le noeud de celle qu'il vient de choisir, plutôt large et plutôt brune. Je demande au candidat s'il s'habille ainsi tous les week-ends.

«Oui quand je suis en campagne. Ça fait plus sérieux. C'est bon pour la crédibilité. De toute façon, moi, je suis un vieux bonhomme dans un corps de jeune.»

En sortant de chez lui, il regarde la photo officielle de la campagne collée en format plus grand que nature sur sa voiture. «Ça, c'est pas moi», dit-il. Sur sa photo en chemise, il manque surtout son immense sourire permanent.

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Tremblay est confiant de remporter Masson, cette circonscription de la rive nord de Montréal réunissant Mascouche, Lachenaie et La Plaine, dont il a remporté l'investiture péquiste en battant l'ancien député du PQ, Luc Thériault, défait aux élections de 2007, qui voulait se représenter.

Pour gagner, «j'ai vendu des cartes», dit-il, et son énergie n'a fait que redoubler depuis qu'il est en campagne pour reprendre la circonscription aux adéquistes, dont la victoire de 2007 a pris tout le monde de court. «On ne l'avait vraiment pas vu venir», résume Jean-Claude Rochon, un de ses organisateurs. «Mais c'est un comté qui a toujours été bleu, dit Tremblay. L'ADQ, dans le fond, c'était juste une autre nuance de bleu.»

Les électeurs y sont majoritairement souverainistes - ils élisent un bloquiste au fédéral -, la population est très majoritairement francophone, catholique...

En faisant du porte-à-porte dans la circonscription, on croise beaucoup de ces électeurs typiques: de jeunes familles qui vont chercher leurs enfants à l'école et au CPE et qui racontent au candidat leurs déboires avec le système d'éducation ou le réseau de la santé.

Ou alors des personnes âgées, qui se prénomment Fortunat ou Lucette, qui se plaignent au candidat des trajets d'autobus qui ne les amènent pas jusqu'au Wal-Mart et qui me demandent comment on fait pour élever une famille en ville. «Ça va vite, non?»

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Lorsque je suis arrivée au local électoral, le premier jour, le ton a tout de suite été donné. On m'avait attendue pour le lunch, servi pour tous les bénévoles dans la pièce centrale de cette vraie maison louée en septembre et au début octobre par l'équipe du Bloc et maintenant par le PQ.

Chacun se tire une bûche, en totale convivialité. À la cuisine, des dames préparent les assiettes. L'une d'elles a préparé de la salade de chou. Une autre a sorti du frigo ses petites betteraves dans le vinaigre maison pour accompagner l'énorme pâté chinois apporté par M. Rochon.

Au dessert, on nous offre des Jos. Louis.

Tremblay ne traîne pas à table longtemps, toutefois. Il a des personnes âgées à aller rencontrer dans une résidence non loin. On prend sa voiture. Sur le chemin, il ouvre sa fenêtre pour saluer ses électeurs en les appelant par leur prénom.

Les jeunes le connaissent parce qu'ils l'ont connu au secondaire ou au cégep. Les plus vieux le connaissent parce qu'il est allé au secondaire ou au cégep avec leur fils ou leur petite-fille...

Ancien conseiller municipal élu à 21 ans, ancien cadet, Tremblay connaît sa circonscription à fond. «Il a été membre de tous les organismes communautaires du comté», dit Gab, un de ses jeunes acolytes en riant.

Le gars a de toute évidence beaucoup de plaisir à parler au monde, à multiplier les poignées de main, à prendre les épaules de façon rassurante. Le soir, au souper de Noël du chapitre local de l'Association québécoise de défense des droits des préretraités et retraités, il danse un slow avec une des organisatrices puis quelques «continental» avec toute la gang...

Il a pris des cours de danse sociale, jadis, mais Johanne Watier, le regarde et laisse tomber en rigolant: «Il est meilleur dans ses discours politiques!»

Le candidat parle à tout le monde. Personne dans la salle ne sera laissé pour compte. Il distribue les «revenez me voir en janvier», ce qui lui vaut des gentilles remontrances du député bloquiste de Montcalm, Roger Gaudet, qui l'aide à faire campagne. «Ne ten metspas trop sur les épaules, Guillaume. Tu pourras pas tout régler».

Mais Tremblay est déjà rendu plus loin à serrer d'autres mains.

 

MASSON

Circonscription de la rive nord qui englobe Mascouche, Lachenaie et La Plaine

CANDIDATS EN 2008

Ginette Grandmont ADQ

Guillaume Tremblay PQ

David Grégoire PLQ

Michel Paulette Parti vert

Gabriel Poirier Québec solidaire

Bertrand Lefebvre Parti indépendantiste

RÉSULTATS DE 2007

ADQ 44%

PQ 36%

PLQ 14 %

Parti vert 3,6%

Québec solidaire 2,5%