La sourde rivalité entre «le méchant» Lance Armstrong et le «gentil» Alberto Contador n'inquiète pas trop les commentateurs espagnols, convaincus que l'Espagnol de 26 ans imposera sa jeunesse au cacique Américain de 37 ans dans les cols pour conquérir son deuxième Tour de France.

Les Espagnols craignent plutôt qu'au sein du guêpier Astana, le danger ne vienne de deux autres coéquipiers de Contador: l'Américain Levi Leipheimer et l'Allemand Andreas Klöden, qui se sont tout deux déjà hissés sur le podium du Tour, humant de près l'ivresse de la vie en jaune.

D'autant que Leipheimer en avait beaucoup (trop?) fait l'an dernier sur la Vuelta dans son rôle de coéquipier modèle, donnant beaucoup de fil à retordre à Contador qui l'avait finalement remporté, bouclant un rare triplé avec le Giro la même année et le Tour de France 2007.

«La présence d'un méchant, très méchant, Armstrong, et d'un gentil très gentil, Contador» aiguise l'intérêt pour la course. «Nous espérons tous que le gentil va gagner. Mais nous ne savons pas quand. Vendredi, peut-être, sur les cimes d'Andorre», résumait ainsi le journal sportif AS.

L'essentiel, soulignait-on mercredi de l'autre côté des Pyrénées, c'est qu'Astana a tourné mardi comme un rouleau compresseur au contre-la-montre par équipes, creusant l'écart sur les rivaux dangereux pour Contador: les frères luxembourgeois Schleck, l'Espagnol Carlos Sastre, l'Australien Cadel Evans et le Russe Denis Menchov.

Et ce grâce à un gros travail d'équipe bien huilé auquel Lance Armstrong, septuple vainqueur de l'épreuve, a solidement contribué, au nom de l'intérêt bien compris de l'équipe et du sien.

«Armstrong a offert le Tour à Contador»

«Une guerre civile dans une telle étape, plus qu'un désastre, aurait été d'une stupidité crasse», relève le chroniqueur du quotidien El Pais.

Ce faisant, «depuis son trône, Armstrong a offert le tour à Contador, mais ce dernier doit commencer à le gagner sur son terrain favori, la montagne», estime le journal, convaincu que l'Américain flanchera sur les cols pyrénéens après le passage à Barcelone jeudi.

Oublié donc l'écart creusé par Armstrong sur Contador à la faveur d'une bordure lors de l'étape de mardi, avec la bénédiction du manageur d'Astana et ami de l'Américain, Johan Bruyneel?

Non, bien sûr. Les commentateurs y ont vu la preuve que Contador avait «un ennemi à la maison». Et la pique vénéneuse d'Armstrong - «Il ne fallait pas être prix Nobel pour savoir qu'il fallait courir devant» - n'a pas contribué à calmer les esprits des journalistes.

Les anciens cyclistes espagnols voient les choses plus froidement. «À mon avis, ce sont plus les médias que les protagonistes qui alimentent la polémique», relève notamment Miguel Indurain. «Armstrong a fait ce qu'il fallait sur la route de la Grande Motte. Celui qui s'est trouvé où il ne devait pas, c'est Contador».

«Bruyneel et Armstrong ne jouent pas contre Contador», estimait mardi El Pais. «Johan veut gagner le Tour et il sait qu'il ne peut le faire qu'avec Contador. Armstrong, bien sûr, veut aussi le maillot jaune à Paris, mais il connaît la force de l'Espagnol et il est réaliste».