Si le Canada appuie la réhabilitation sociale des enfants-soldats «qui ont été recrutés de façon illicite», la position du gouvernement quant au Canadien Omar Khadr, détenu à Guantanamo, ne change pas, a tranché le ministre des Affaires étrangères.

L'opposition a questionné l'attitude du gouvernement dans ce dossier, vendredi, en accusant les conservateurs de faire preuve d'hypocrisie.

Selon le Bloc québécois et le Parti libéral, le gouvernement devrait respecter le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, qu'il a lui-même ratifié en 2000. Le document sur l'implication d'enfants dans les conflits armés appelle les pays signataires à traiter les soldats âgés de moins de 18 ans comme des victimes, en vertu de la justice internationale, et à assurer «leur pleine réinsertion sociale et leur plein rétablissement physique et psychologique».

Cet engagement d'Ottawa devrait s'appliquer dans le cas d'Omar Khadr, qui a été capturé en Afghanistan à l'âge de 15 ans, ont réclamé les deux partis, qui demandent en outre son rapatriement.

Le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, a répliqué, aux Communes, que le Canada adhère au Protocole, mais que le cas Khadr est différent.

«Le Canada appuie la réadaptation des enfants en situation de conflits armés, qui ont été recrutés de façon illicite et utilisés dans le cadre des hostilités, notamment ceux qui ont été poussés à commettre des crimes», a plaidé le ministre.

Mais ce document n'empêche pas la poursuite en justice des enfants-soldats, a-t-il souligné, en notant au passage que Khadr avait plaidé coupable, il y a deux semaines, à des accusations de meurtre, de conspiration et d'avoir été membre d'al Qaïda.

Né en banlieue de Toronto, en Ontario, Omar Khadr est le fils d'un ancien proche d'Oussama ben Laden et ses frères ont eux aussi fait face à des accusations d'actes terroristes dans le passé. Dans le cadre de son procès militaire, à Guantanamo Bay, il a admis avoir suivi un entraînement terroriste à la fin de son enfance et au début de son adolescence, lors de voyages avec son père en Afghanistan et au Pakistan.

Le quotidien Le Devoir révélait vendredi que le gouvernement canadien a dépensé quelque 18 millions $ en trois ans pour convaincre d'autres États de réintégrer les enfants-soldats de leur pays, principalement par l'entremise de l'Agence canadienne de développement international (ACDI).

Or, tout au long du procès du Canadien Omar Khadr - le dernier ressortissant occidental détenu à la base américaine de Guantanamo - Ottawa a refusé d'intervenir, en plaidant que c'était une affaire entre les mains de la justice américaine.

L'opposition accuse maintenant les conservateurs d'avoir deux discours: un pour l'étranger et un autre au pays.

«L'empressement du Canada à aider les pays aux prises avec cette douloureuse réalité des enfants-soldats est suspecte quand on voit avec quelle hypocrisie et quelle désinvolture il a traité l'enfant-soldat Omar Khadr», a scandé le bloquiste Jean Dorion à l'endroit des conservateurs, aux Communes.

«On est enfant-soldat ou on l'est pas là», a renchéri son collègue Mario Laframboise, à sa sortie de la Chambre.

De l'avis de l'opposition, le gouvernement canadien n'avait d'autre choix que de respecter le Protocole auquel il a souscrit.

«Pour moi, ça a toujours été un enfant-soldat et le Canada, ne se conformant pas à une convention qu'il a lui même signée, c'est encore une tache sur notre dossier international», a pour sa part dénoncé le libéral Denis Coderre, en rappelant au passage la rebuffade qu'a subie le gouvernement canadien lorsqu'il n'a pas pu décrocher un siège au Conseil de sécurité de l'ONU, mi-octobre, faute d'appuis suffisants.