Alors que la sélection des jurés commençait, au premier jour du procès du Canadien Omar Khadr à Guantánamo, l'ONU a condamné la procédure qui se déroule actuellement devant une commission militaire américaine.

«Le cas d'Omar Khadr va établir un précédent qui pourrait mettre en péril le statut d'enfant-soldat à l'échelle de la planète», a déclaré Radhika Coomaraswamy, représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies pour les enfants et les conflits armés.

Dans un communiqué, elle ajoute que la Cour pénale internationale dit clairement qu'aucune personne de moins de 18 ans ne devrait être jugée pour crimes de guerre.

À Guantánamo, toutefois, la condamnation de l'ONU n'a eu aucun effet sur la poursuite du processus. Les avocats du gouvernement et de la défense ont continué leurs interrogatoires en règle des candidats jurés.

Souriant, Omar Khadr a fait son entrée dans la salle d'audience habillé comme il ne l'avait probablement jamais été: pantalon noir, chemise blanche, veston gris foncé, cravate saumon et souliers cirés. Le costume tranchait radicalement avec les habits blancs de détenu qu'il portait jusqu'à la veille, lors des audiences préliminaires, et lui donnait un air plus vieux et sérieux.

«J'ai découvert un placard plein de chemises, de vestons, de pantalons et de souliers dans l'édifice de la cour. Je ne sais pas à qui ils appartiennent», a lancé Dennis Edney, le coloré avocat canadien du détenu, devant un parterre de journalistes interloqués, à sa sortie du tribunal.

«Omar était d'accord, alors j'ai couru et j'ai trouvé des vêtements et des souliers qui lui faisaient, a-t-il poursuivi. Je l'ai habillé et j'ai fait son noeud de cravate.»

Interrogé à savoir si c'était la première fois que son client portait un complet-cravate, Me Edney a répondu que c'était «très certainement» la première depuis huit ans, soit depuis qu'il a été appréhendé en Afghanistan, en juillet 2002, alors qu'il n'avait que 15 ans.

«Aujourd'hui, on a vu Omar le jeune homme. Quand il s'est vu dans le miroir, il rayonnait. Juste pour ça, c'était une belle journée», a ajouté Me Edney.

Une première

Accusé du meurtre d'un soldat, tué par une grenade, le jeune Canadien sera le premier prisonnier de Guantánamo à avoir un procès pour crimes de guerre sous l'administration Obama.

Mardi, les procureurs du gouvernement américain ont tenté de s'assurer que l'âge de l'accusé au moment des faits qu'on lui reproche ne sera pas considéré comme un facteur atténuant.

«Êtes-vous d'accord pour qu'un mineur soit jugé devant un tribunal pour adultes?» a demandé sans détour un des procureurs, Jeff Groharing, à chacun des 15 candidats jurés, tous soldats de l'armée américaine. Tous ont répondu par l'affirmative.

Plus détendu dans son approche, l'avocat de la défense, le lieutenant-colonel Jon Jackson, a voulu s'assurer que les membres du jury comprennent bien que la présomption d'innocence signifie que les procureurs du gouvernement, qui ont le fardeau de la preuve, doivent démontrer hors de tout doute raisonnable qu'Omar Khadr est coupable des actes qu'on lui reproche.

Les soldats ont exprimé leur confiance dans le processus des commissions militaires, qu'ils ont qualifié de juste et équitable.

Les cinq candidats jurés qui ont par la suite comparu individuellement devant la Cour ont tous combattu dans des missions au Proche-Orient, soit lors de la première guerre du Golfe, soit récemment, en Irak. Les interrogatoires individuels se poursuivent aujourd'hui. Le jury doit être composé d'au moins cinq membres choisis parmi les 15 candidats. Si le processus se termine assez tôt en après-midi, les déclarations d'ouverture des deux partis pourraient aussi se dérouler aujourd'hui.