«L'inaction volontaire du gouvernement Charest» pour protéger le français fait en sorte que «l'anglais est redevenu un avantage» dans le monde du travail à Montréal, dénonce le Parti québécois (PQ) en réaction au reportage de La Presse sur les dérapages linguistiques sur le chantier du CHUM.

Des propos corroborés par Jean R. Gauthier, dirigeant de Gauthier Conseils. «En plus de 30 années d'expérience à titre de conseillers en recrutement, jamais nous n'avons rencontré une attitude aussi méprisante et peu professionnelle», déplore-t-il en visant l'un des partenaires du consortium pour lequel il devait recruter une quinzaine d'ingénieurs au printemps 2011.

Il soutient s'être retiré après avoir compris que des ingénieurs unilingues de l'Ontario seraient préférés aux Québécois bilingues et qualifiés qu'il avait sélectionnés. «Le bilinguisme [des francophones] n'était plus une condition préalable, mais simplement un atout!», dit-il en ajoutant qu'il s'en est plaint à la direction du CHUM. «Il est peu probable que ces gens puissent dire aujourd'hui qu'ils ignoraient cette situation pour le moins désolante.»

«C'est inacceptable, d'autant plus que c'est le gouvernement qui est donneur d'ouvrage, a dit la ministre de la Culture, Christine St-Pierre. Le consortium va vraiment devoir changer son fusil d'épaule. Pour les récalcitrants, il y a les tribunaux et des amendes sévères. On a 97 dossiers devant la Cour du Québec en ce moment.»

Hier, La Presse a révélé que le consortium étranger chargé de la construction du nouveau CHUM semblait éprouver des difficultés à comprendre que le français était la langue du travail au Québec. Certains fournisseurs et sous-traitants se seraient fait dire qu'il fallait communiquer en anglais. L'un d'eux a même déposé une plainte auprès de l'Office québécois de la langue française qui a lancé une enquête.

«Pas de compromis»

«Nous sommes rendus au point où avoir une entreprise qui fonctionne en français est une tare sur le plus gros chantier du gouvernement québécois, proteste le député péquiste de Drummond, Yves-François Blanchet, porte-parole en matière de langue. Tout ça parce que le gouvernement ne veut pas s'aliéner les seuls qui votent encore pour lui, les anglophones.»

«Il n'y a pas de compromis à faire même si ce sont des compagnies qui viennent de l'étranger, réplique la ministre St-Pierre. Nous avons donné des ressources supplémentaires à l'Office québécois de la langue française.»

En entrevue avec Paul Arcand, au 98,5 FM, Paul Landry, directeur du projet du nouveau CHUM, a dit «trouver la situation très sérieuse». Il a ajouté qu'il y a eu une «discussion très directe et très claire» avec le consortium mardi, après l'appel de La Presse.

Le militant nationaliste Gilles Rhéaume demande carrément au gouvernement de mettre le CHUM sous tutelle, «qu'un inspecteur permanent soit sur les lieux afin de vérifier l'application intégrale de la loi 101 et que ceux qui ont transgressé la loi soient sévèrement sanctionnés».

«La personnalité distinctive de Montréal en tant que métropole française en Amérique en prend pour son rhume», déplore Richard Bergeron, chef de la deuxième opposition à l'hôtel de ville.

- Avec Pierre-André Normandin