Il y a pire que le «syndrome de la pépine». La «phobie du cratère» a frappé le gouvernement Charest. La ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, se méfie comme de la peste du projet d'activer l'excavation pour la construction du CHUM au centre-ville.

Politiquement, «il n'y a rien de pire qu'un trou qui n'est pas rempli» au centre-ville, a confié hier à La Presse une source proche de la réflexion sur le projet maintenant vieux de 10 ans. Le gouvernement ne devrait pas donner le feu vert à l'excavation avant d'avoir à tout le moins lancé l'appel de proposition pour la construction en partenariat public privé, indique-t-on chez les spécialistes mandatés par Québec pour ce projet de 1,6 milliard de dollars, dont la livraison est passée de 2006, à 2010, à 2013.

La ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget est, indique-t-on, passablement perplexe devant les intentions du représentant nommé par le ministre Couillard, Clermont Gignac, d'essayer de gagner du temps en commençant plus rapidement que prévu l'excavation nécessaire au centre-ville. Dans ce scénario accéléré, on pourrait commencer dès l'été. En commission parlementaire à Québec, M. Gignac avait indiqué que ces travaux d'excavation pourraient commencer à l'automne 2008. Les travaux proprement dits pourraient alors commencer dès 2009.

Mais amorcer le travail avant même que Québec ait lancé les appels de soumissions pour le projet représente un gros pari. Il faudrait que les appels d'offres soient lancés d'ici un mois pour penser à une excavation à la fin de l'été. Or, à Québec, on est encore loin du compte, confie-t-on.

L'excavation n'est pas une étape compliquée techniquement. Mais elle nécessite du temps, probablement un an. L'amorcer plus tôt, explique-t-on, permettrait d'accélérer «un peu les échéanciers».

Risques nombreux

Mais les risques sont nombreux. Si l'excavation est faite, elle doit coïncider avec l'édifice à venir, car il faudra construire des murs de soutènement, ce qui forcera le gouvernement à prendre des risques.

Car Québec craint par-dessus tout qu'une fois creusé le cratère au centre-ville, plusieurs mois se passent encore en tergiversations. Du côté du financement aussi on est dans la choucroute. La Fondation du CHUM est bien loin encore des 200 millions qu'elle doit obtenir du secteur privé. La campagne de financement du CHUM n'a même pas de président actuellement. Le début des travaux concrets stimulerait la collecte de fonds, croit-on, mais les grandes entreprises se font davantage tirer l'oreille tant qu'un projet n'est que sur papier.

Relancé sur cette intention de presser le pas, le ministre Philippe Couillard a souligné que la prudence restait de mise. Rien ne sera hâté si les deux consortiums identifiés ne s'entendent pas sur le contour du terrain et le volume à excaver.

Controverse

Même la controverse autour du parc légué par la famille de Louis-Joseph Papineau risque d'avoir un impact sur le projet. La hauteur de l'édifice pourra varier selon la surface disponible, a expliqué M. Couillard il y a quelques jours, un flottement qui en dit long sur l'état embryonnaire du projet d'hôpital.

Si on est loin d'avoir décidé de mettre le pied sur l'accélérateur, la démolition du vieux bâtiment de Saint-Luc paraît, elle, «probable». Un projet de rénovation finit toujours par coûter plus cher qu'une construction à partir de zéro, observent les spécialistes. Québec peut toujours modifier le tir pour cette partie du projet, qui se fait en mode traditionnel plutôt qu'en PPP.