Au printemps 2007, l'annonce de l'intention de Clermont Bégin de s'installer dans un quartier de Longueuil a suscité la colère de son voisinage. Emprisonné pendant 11 ans pour agression sexuelle et tentative de meurtre contre une adolescente de 16 ans, l'homme n'avait jamais suivi ses thérapies jusqu'au bout et avait été jugé à risque «élevé» de récidive par la Commission nationale des libérations conditionnelles. Chassé de son logement longueuillois et d'une résidence religieuse de Saint-Césaire, Bégin avait trouvé asile dans une maison de transition du quartier Ahuntsic, à Montréal, avant de trouver un nouveau logement en ville.

Depuis, le nom de Clermont Bégin n'a été évoqué que par les partisans d'un registre d'agresseurs sexuels qui serait accessible au public. L'Action démocratique en a même fait un engagement électoral pendant la dernière campagne. Une pétition de 62 500 noms a été déposée en 2007 à l'Assemblée nationale par une mère dont la fille avait été victime d'un agresseur sexuel récidiviste qui s'était installé dans son voisinage.

 

Les experts partagés

Mais la publication des noms des agresseurs sexuels est loin d'emballer les experts. C'est d'ailleurs ce qu'avait rappelé le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, lorsqu'il a reçu la pétition. Aux États-Unis, où de tels registres sont publics, d'ex-détenus ont été battus ou assassinés par des citoyens en colère. «Est-ce que nous voulons, au Canada, encourager le «oeil pour oeil, dent pour dent»? avait demandé le ministre. Je ne prête de mauvaises intentions à personne, mais c'est le grand danger. Les risques que les gens décident de se faire justice eux-mêmes sont très grands.»

D'autant plus que le public ne serait pas nécessairement beaucoup mieux protégé, soulignent d'autres. La grande majorité des victimes d'agression sexuelle connaissent leur agresseur, a rappelé dans La Presse en août 2007 Josée Rioux, directrice générale du Regroupement des intervenants en matière d'agression sexuelle. «Le registre va servir à quoi? À savoir qu'un enfant a été victime de son père?»