Dans le branle-bas de combat pour lancer rapidement la plus vaste campagne de vaccination jamais organisée au Canada, en 2009, des doses du vaccin contre la grippe A (H1N1), et dont la valeur atteint au moins 8 millions de dollars, ont dû être détruites.

Raison de la destruction: la date de péremption de 18 mois indiquée sur l'emballage a dû être raccourcie de 12 mois à la suite de tests menés par Santé Canada démontrant que la puissance d'action du vaccin (antigène) diminuait plus rapidement que prévu. Ce faisant, le vaccin n'était plus disponible à partir de juin 2010.

Le vaccin en question, Arepanrix H1N1 (avec adjuvant), a été produit par le géant pharmaceutique GlaxoSmithKline (GSK). Au Québec, il représente environ 96% des doses qui ont été administrées à plus de la moitié de la population, soit à environ 4,4 millions de personnes.

Le gouvernement fédéral a entrepris des négociations avec le fabricant GSK pour obtenir un dédommagement de 6 millions de dollars. Dans une note de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada signée par le sous-ministre François Guimont et que La Presse a obtenue, on apprend que GSK offrirait plutôt 4 millions. Et que les pourparlers se poursuivaient toujours en octobre 2010.

Santé Canada n'a pas été en mesure, cette semaine, de dévoiler combien de doses exactement ont dû être détruites. Chaque dose se vendait au prix unitaire de 8$. Mais on indique que 14 millions de doses d'une autre formule avec adjuvant ne sont «pas encore expirées et qu'elles ont été mises en réserve chez le fabricant GSK pour une possible utilisation ultérieure». La société GSK n'a pas donné davantage de détails. Tout au plus, la direction des communications a rappelé que les «stocks restants sont propriété du gouvernement» et que l'un de ses représentants serait mieux placé pour nous répondre. La Presse attend toujours un entretien avec un dirigeant de Travaux publics Canada.

Dans son rapport traçant le bilan de la vaccination contre la grippe pandémique en 2009, la Direction de la santé publique (DSP) du Québec explique pour sa part qu'afin de «gagner du temps», Santé Canada a permis à toutes les provinces, le 17 octobre 2009, de stocker l'Arepanrix dans leurs entrepôts avant même que les doses ne soient autorisées à la vente. Cinq jours plus tard, le 21 octobre, une ordonnance a été lancée et les provinces ont commencé à distribuer le vaccin dans les régions. Ce n'est qu'au printemps, le 8 avril 2010, que l'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) a avisé les provinces que la date de péremption était devancée d'un an.

Ce premier lot de vaccins avec adjuvant a aussi retenu l'attention de la DSP du Québec dès les premières semaines de la campagne de vaccination à cause d'un problème d'anaphylaxie (allergies).

En date du 5 novembre 2009, sept anaphylaxies avaient été déclarées, et une personne avait été hospitalisée. Des analyses préliminaires avaient démontré la formation d'agrégats dans les vaccins lorsqu'ils étaient reconstitués longtemps à l'avance. Pour cette raison, les vaccinateurs avaient reçu l'ordre d'administrer le vaccin dans l'heure suivant sa reconstitution. À ce jour, les autorités s'expliquent toujours mal pourquoi il y a eu autant de cas de paresthésie (engourdissement du visage, des bras ou des jambes); il y a eu 110 cas déclarés, comparativement à 32 cas durant les campagnes pour la grippe saisonnière comprises entre 2003 et 2008.

- Avec William Leclerc