Le virus de la grippe porcine pourrait se résorber, déclencher une pandémie «douce» mais néanmoins mortelle ou bien devenir un tueur majeur comparable à la grippe espagnole, selon trois scénarios détaillés dimanche lors d'un important congrès médical organisé à Helsinki.

Le Néerlandais Albert Osterhaus, un des virologues les plus réputés au monde, a appelé les autorités sanitaires à rester vigilantes, même si la nouvelle souche du virus H1N1 s'est révélée moins redoutable que prévu il y a quelques semaines.

«La menace actuelle du H1N1 est sérieuse», a-t-il estimé lors d'une réunion d'information du Congrès européen de microbiologie clinique et des maladies infectieuses (CMECMI) d'Helsinki, le premier congrès médical majeur organisé depuis l'émergence de la crise sanitaire fin avril.

«Le virus a trois options», a résumé le professeur du laboratoire Erasmus de l'université de Rotterdam aux Pays-Bas. «Il pourrait tout d'abord disparaître spontanément, mais je ne suis pas convaincu que ce soit le cas».

«Il pourrait aussi entraîner une pandémie ''douce'', comme la grippe asiatique», a-t-il dit, en référence à l'épidémie de 1957-1958 qui avait tué entre un et quatre millions de personnes.

A titre de comparaison, la grippe normale -dite saisonnière- tue entre 250 000 et 500 000 personnes chaque année, selon l'OMS.

«Dans un scénario catastrophe, nous aurions une grave pandémie, similaire à la grippe espagnole, qui pourrait provenir de la mutation du virus», a poursuivi M. Osterhaus, en référence à la pandémie de 1918-1919 qui aurait fait près de 50 millions de morts.

«Je ne prédis pas que cela va arriver, mais même s'il n'y avait que 10% de chance d'avoir un scénario comme celui là, nous ferions mieux d'être préparés», a-t-il plaidé.

Sur la base des dernières données disponibles, M. Osterhaus et son confrère espagnol Javier Garau, professeur à l'université de Barcelone, ont décrit les caractéristiques du virus.

Concernant la vitesse de transmission, il s'avère légèrement plus contagieux qu'une grippe normale: en moyenne, chaque individu infecté transmet la maladie à 1,4 à 1,6 personne.

Une forte proportion de cas concerne des jeunes, ce qui suggère que les personnes âgées ont une forme d'immunité liée à des expositions passées à des virus similaires, a relevé M. Garau. Les malades peuvent être contagieux un jour avant le diagnostic et jusqu'à sept jours après.

Pour la virulence, la nouvelle grippe a un taux de mortalité comparable à la grippe saisonnière, mais la dangerosité pourrait s'accroître si le microbe mute génétiquement avec d'autres virus.

Les symptômes sont ceux d'une «légère grippe», selon M. Garau: gorge douloureuse, fièvre, maux de tête, troubles gastriques.

Concernant le traitement, le virus A (H1N1) est sensible à l'antiviral Tamiflu, qui a été stocké lors de l'apparition de la grippe aviaire. Mais la grippe saisonnière, avec qui les scientifiques redoutent de voir muter la grippe porcine, a montré des signes de résistance au traitement lors des deux dernières saisons.

Enfin, un vaccin peut être produit contre la souche actuelle du H1N1, mais pourrait s'avérer inefficace en cas de modification génétique importante.

En outre, environ six mois sont nécessaires avant que la première dose ne sorte des laboratoires et les limites de production pourraient signifier que seules un milliard de personnes pourraient être vaccinées dans un premier temps, a souligné M. Osterhaus.

Ce qui met les fabricants de vaccins face au dilemme de devoir choisir rapidement ce qui constitue la plus grande menace: la grippe saisonnière ou la grippe porcine, «une décision difficile à prendre», selon le Néerlandais.

Le congrès d'Helsinki, qui rassemble près de 8000 médecins, s'achève mardi.