Le gouvernement mexicain a estimé vendredi que  le virus de la grippe porcine n'était pas «aussi agressif» que redouté, tout en jugeant encore «imprévisible» l'évolution de épidémie qui a fait 16 morts et retient des millions d'habitants cloîtrés.

Le ministre de la Santé, José Angel Cordova, a annoncé dans la soirée que le Mexique comptait une nouvelle victime de cette maladie, qui a infecté au total 381 patients, soit 53 de plus par rapport au dernier bilan. «La situation est pour le moment imprévisible», a souligné M. Cordova, affirmant manquer d'une «donnée cruciale» pour préciser le degré de létalité du virus À (H1N1): celle du nombre de nouveaux cas chaque jour.

«Il nous faut davantage de jours pour estimer la tendance de l'épidémie et évaluer si elle est déjà en train de baisser», a encore insisté le ministre.

Un peu plus tôt dans la journée, il avait soutenu que le virus n'était pas «aussi agressif» et présentait un taux de mortalité inférieur à la grippe aviaire ou le SRAS, responsable de la mort de 800 personnes en 2003, surtout en Asie.

La grippe porcine garde toujours ainsi son mystère au Mexique. On sait juste que la plupart de ses victimes sont des femmes, dont une Mexicaine enceinte de sept mois.

En attendant d'en savoir plus, de nombreux habitants continuent de rester chez eux, à l'appel du président Felipe Calderon qui a exhorté la population à ne pas quitter la maison, durant les cinq jours fériés du pont du 1er Mai.

Certains ont toutefois choisi de prendre un bol d'air à Acapulco, station huppée du Pacifique, bravant l'hostilité de la population locale. Un autocar en provenance de la capitale a été accueilli à coups de pierre.

«Ils ne devraient pas venir, ils apportent le virus avec eux», peste Edgar Rubio Hernandez, un professeur qui réside sur place.

Les mesures draconiennes prises pour éviter la contagion sont maintenues, notamment à Mexico, où tous les lieux de restauration et de loisirs restent fermés jusqu'à mercredi.

Les fanatiques de football, sport roi du pays, ne trouveront pas consolation dans les stades, où les rencontres se jouent à huis clos ce week-end.

Le Zocalo, la place centrale de cette mégalopole de 20 millions d'habitants aux allures de ville fantôme, a été privé du traditionnel cortège de la fête du Travail, suspendue vendredi par les syndicats.

De brefs incidents ont éclaté entre les forces de l'ordre et environ 200 manifestants de gauche venus défiler devant le palais présidentiel, deux jours avant l'ouverture officielle de la campagne des législatives du 5 juillet.

«Calderon profite de la grippe porcine pour semer la terreur», affirme à l'AFP Delfina Rivera, 45 ans, reprochant au président conservateur d'empêcher les gens de manifester.

Les consignes de restriction ont aussi provoqué un «léger incident» dans une prison de la capitale, où les détenus ont tenté d'allumer un incendie pour dénoncer la suspension des visites.

Le gouvernement doit décider en début de semaine s'il maintiendra ou non les mesures de fermeture, qui touchent aussi les écoles et les grands sites touristiques comme les ruines précolombiennes.

Selon le ministère du Tourisme, la fréquentation va baisser de moitié, en particulier pour les plages paradisiaques de la péninsule atlantique du Yutacan avec 70% d'annulations.

«Les dix prochains jours seront critiques», a prédit Marcelo Ebrard, le maire de Mexico, où une centaine d'unités médicales mobiles ont été installées, provoquant une ruée d'habitants inquiets.

«Faut-il que je sois mourante pour que l'on m'examine ?», s'impatiente Patricia Salazar, une femme aux yeux rougis et à la gorge irritée, venue profiter de ce service.