La famille d'une victime québécoise de l'amiante reproche à la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) de s'être substituée à elle sans ménagement en vue d'obtenir des paiements d'indemnisation aux États-Unis.

«Je sens qu'on m'a volé le contrôle sur ce dossier-là. Je trouve ça vraiment dommage... On peut me dire n'importe quoi sur ce qui se passe et je n'ai plus qu'à gober tout ça», déplore Sonia Venne.

Son père, Jacques Venne, qui résidait à Saint-Léonard, est mort en 2007 d'une maladie pulmonaire liée à une exposition prolongée à l'amiante. Il s'était vu attribuer quelques années plus tôt une indemnité de 51 963$ de la CSST.

Mme Venne affirme avoir pris contact en 2009 avec un cabinet d'avocats américain qui lance régulièrement des campagnes dans les médias pour trouver des victimes du produit cancérigène.

Ses représentants ciblent en leur nom des sociétés américaines ayant utilisé l'amiante dans leurs produits et qui ont dû aménager des fonds d'indemnisation pour faire face à l'accumulation des poursuites.

Des victimes québécoises de l'amiante sont susceptibles de recevoir de l'argent de ces fonds, notamment lorsque les produits ont été exportés et utilisés dans la province.

Mme Venne affirme qu'elle avait terminé la préparation du dossier avec le cabinet d'avocats, Motley Rice, et attendait de connaître le résultat lorsqu'elle a été informée, à sa grande surprise en novembre 2011, qu'elle ne «pouvait poursuivre cette réclamation à titre privé» et que le processus se ferait plutôt «pour le compte de la CSST».

Jacques Nadeau, porte-parole de l'organisation, note que les droits de réclamation des travailleurs qu'elle indemnise au Québec lui sont subrogés et lui permettent de demander dédommagement à des tierces parties.

En 2011, les dossiers de près de 2000 personnes indemnisées sur une période de 10 ans ont été soumis à Motley Rice dans le but de solliciter les fonds américains. Les familles concernées ont été avisées de l'initiative dans une lettre qui précisait que toutes les sommes obtenues qui excéderaient l'indemnisation initiale leur seraient reversées.

Une douzaine de familles, au dire de M. Nadeau, ont alors fait savoir à la CSST qu'elles avaient déjà engagé des procédures du côté américain.

«Qu'ils nous appellent»

L'organisation, affirme le porte-parole, leur a «laissé le terrain libre» pour poursuivre leurs démarches, même si la subrogation lui permettait en théorie de se substituer à elles.

La CSST estime qu'il a pu y avoir «malentendu» dans le dossier de Jacques Venne. Elle se dit prête à corriger le tir au besoin si elle s'est substituée par mégarde à la famille ou que la firme d'avocats a fait une erreur.

«Qu'ils nous appellent, nous prêterons une oreille attentive», a déclaré M. Nadeau.